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Economie / FRANC CFA, CATASTROPHE du Docteur Yacouba FASSASSI : L’intégration régionale avec une monnaie unique est très impérieuse pour éviter un tsunami économique des pays de la Zone Franc.


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Le Franc CFA ou la Monnaie des PMA (Pays pas moyen d’avancer), c’est le dernier ouvrage du Docteur Yacouba Fassassi publié aux Editions l’Harmattan à Paris. Un ouvrage qui, avec courage et lucidité, lève le tabou du franc CFA en projetant l’Afrique dans une ère de libération et de responsabilité. Il ne tient qu’aux Africains, ceux de la zone Franc utilisant le Franc CFA, spécifiquement ceux de l’Afrique de l’Ouest, de faire de l’espace CEDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) une zone monétaire solide et stable. Béninois, spécialiste chevronné de la monnaie, l’auteur engage sur les pages de ce livre ce pari et propose une rupture rapide mais intelligente qui passe par la caution de la France pour une intégration régionale, économique et monétaire avec une monnaie unique au sein de la Communauté. Une communauté puissante, unie et bilingue qui préparera ainsi la voie à un partenariat très profitable pour l’hexagone. Ci-joint cet entretien démonstratif posté sur Youtube et transcrit pour nos lecteurs.

Bonjour Dr, vous êtes un de ces écrivains qu’on ne présente plus. Pouvez-nous parler de votre dernier livre paru aux éditions l’Harmattan à Paris, intitulé : « Le Franc CFA ou la Monnaie des pays Pas moyen d’avancer (PMA) ?

Ph:DR-: Dr Yacouba FASSASSI : « Le système Franc Cfa a condamné à jamais les pays africains à demeurer les plus indigents et les plus pauvres de la planète ».

Ph:DR-: Dr Yacouba FASSASSI : « Le système Franc Cfa a condamné à jamais les pays africains à demeurer les plus indigents et les plus pauvres de la planète ».

Dr Yacouba FASSASSI : Je m’appelle Yacouba Fassassi, Béninois, Economiste principal du Fonds monétaire international (FMI) ici à Washington, à la retraite. Je suis consultant international et Chef d’entreprise. Le FMI m’avait affecté au Bénin où j’ai été le Conseiller spécial des deux premiers présidents de l’ère du renouveau démocratique pendant environ 15 ans.

Mon dernier livre publié aux éditions l’Harmattan à Paris porte sur le Franc CFA, avec l’intégration économique et monétaire avec une monnaie unique au sein de la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Ce livre est né d’un constat et de la conviction d’un économiste que je suis.

Quel est ce constat ?

Les pays africains du système des choses du Fcfa sont individuellement et globalement moins développés que tous les autres pays africains en particulier, les pays anglophones. La conviction, c’est que ces pays appartenant à la zone franc vont poursuivre inexorablement leur régression économique et sociale. Toute chose marquée par l’accentuation de la pauvreté et de la misère. A cette étape, il n’y aura plus d’Etat, plus de démocratie, mais plutôt l’anarchie et le sauve qui peut général.

Je souligne qu’il ne s’agit pas là, comme en tauromachie, d’un chiffon rouge qu’on jette à la face de nos dirigeants pour leur faire peur. Non ! C’est la réalité qui se dessine et qui est inévitable si très rapidement nos pays ne rompent pas très intelligemment avec le système du Fcfa et ne se mettent résolument sur la voie de l’intégration régionale monétaire, librement pensée, honnêtement voulue et volontairement assumée en toute responsabilité et en toute connaissance de cause.

Autrement dit, le choix est entre l’intégration monétaire et fédérale ou la mort de nos Etats du monde Franc Cfa. Mes convictions se sont  formées au cours d’un parcours d’économiste, non seulement de théoricien de la macroéconomie et de la monnaie mais aussi et surtout dans le feu de l’action que ce soit dans les diverses fonctions, en France, au Bénin, aux Etats-Unis au Fonds monétaire, au Sénégal au sein de la BCEAO, au Maroc, au Nigeria, au Ghana et en Ouganda pour ne citer que ces quelques pays. Notez, jeune chercheur à l’Université Paris 9 Dauphine où j’ai obtenu mon premier Doctorat en 1968, j’ai eu la chance et le bonheur de faire partie des différents groupes d’études et de recherches aux côtés des Economistes français, anglais et allemands où nous avons préparé des rapports Optica I et II, des repas qui ont constitué  l’architecture intellectuelle  pour la naissance de la monnaie unique européenne, l’Euro.

« Les pays de la Zone Franc sont des sinistrés de l’Euro »

Les pays européens de la zone euro, devraient constituer à terme une zone monétaire optimale  avec le respect des critères de convergence et le fédéralisme budgétaire qui permet de rénover le niveau de développement économique et social des pays les moins développés de la zone. Ce qui explique les financements massifs mis à la disposition des pays comme la Grève et d’autres pays moins développés de la zone.

Les pays africains qui ont décidé de s’arrimer à l’euro, sont inscrits en deuxième division de la zone euro. A ce titre, ils ne bénéficient d’aucune aide de la banque centrale européenne (BCE) et sont plutôt des sinistrés de l’Euro.

Le Franc CFA ou la Monnaie des PMA (Pays pas moyen d’avancer)

Le Franc CFA ou la Monnaie des PMA (Pays pas moyen d’avancer)

« La Cedeao, une meilleure candidate à une monnaie unique »

Si l’Europe a réussit à créer sa monnaie unique, pour tirer le maximum des avantages économiques d’échelle liée à toute intégration économique, monétaire, régionale ; pourquoi  les pays de l’Afrique de l’Ouest qui ont une même histoire et une même civilisation en particulier les pays de la CEDEAO ne pouvaient-ils pas avoir  leur propre monnaie unique ? Surtout que l’espace Cedeao est plus proche que l’Europe d’une zone monétaire optimale.

Autrement dit, la Cedeao est meilleure candidate que l’Europe à une monnaie unique. La France en créant le 25 décembre 1945 le Fcfa, (Franc des Colonies Françaises d’Afrique) a fait œuvre utile en mettant ensemble ces colonies en leur donnant une même monnaie. Tout comme elle leur a imposé au début de l’assimilation aux colonisations une même langue : la langue française.

« Le Franc Cfa ne correspond plus aujourd’hui à aucune réalité économique ».

Mais aujourd’hui, on peut constater que le Franc CFA a vécu. Il faut maintenant changer son fusil d’épaule. L’Euro auquel le Fcfa est arrimé, n’est pas la monnaie des échanges extérieurs de nos pays. Le Franc Cfa ne correspond plus aujourd’hui à aucune réalité économique.

A l’analyse, le Fcfa est devenu un système d’exploitation des pays les plus pauvres et les plus indigents de la terre. Un système de transfert systématique au Trésor français des devises étrangères (Dollars, Euro, Yen) chèrement gagnées des exportations de nos pays. A travers le système du Fcfa, les pays africains enrichissent la France en s’appauvrissant.

Quelques velléités de dirigeants français et africains

Les présidents de la République française pas des moindres, ont eu l’honnêteté intellectuelle de reconnaitre cette évidence. Cette dure réalité de plus en plus insupportable car déshumanisante. Le président François Mitterrand disait en 1994 : « En ce début d’année, on continuera à voler les Africains. Ils s’appauvrissent sans cesse. En 1994, il y aura encore plus de flux de capitaux de l’Afrique vers les pays industrialisés que l’inverse ».

Le président Jacques Chirac en tirant la sonnette d’alarme sur les conséquences désastreuses du Fcfa, sur les économies africaines, a déclaré en 2012 ceci : « On n’oublie une chose, c’est qu’une partie de l’argent qui se trouve dans notre porte-monnaie vient précisément de l’exploitation depuis des siècles de l’Afrique. Alors il faut avoir un petit peu de bon sens, de justice ; je ne dis pas de générosité mais de justice pour rendre aux Africains ce qu’on leur a pris, d’autant que c’est nécessaire ; si l’on veut éviter les pires convulsions ou les difficultés avec des conséquences politiques que ça comporte dans un proche avenir ».

L’ancien président du Niger, Mahamane Ousmane disait : « Pensez-vous avoir le sommeil tranquille dans les années à venir si vous n’engagez pas la rupture avec le système Franc Cfa ? ».

Quant à l’ancien président sénégalais Abdoulaye Wade, il avait courageusement réclamé en 2007, « Que la France restitue aux pays africains, de la zone franc, leur argent ». « L’argent du peuple africain bloqué au Trésor public français doit être rapatrié en Afrique afin de profiter aux économies des Etats de la BCEAO. L’on ne peut pas avoir des milliards de milliard passés dans les marchés boursiers étrangers et dire en même temps, qu’on est pauvre et aller ensuite quémander de l’argent » ajouta-t-il. Le président Wade conclut en qualifiant la zone franc de « Zone d’exportation des profits » et il ajoute : « C’est une zone dans laquelle, ceux qui gagnent de l’argent le matin, l’exportent le soir ».

Le système Franc Cfa a condamné à jamais les pays africains à demeurer les plus indigents et les plus pauvres de la planète. Mais ce qui précède, on peut facilement voir que la disparition de nos Etats n’est plus une hypothèse de théoricien. Pour le moment, les ravages du Fcfa arrimé à l’euro  sont plus visibles à travers la conversion de l’économie souterraine. Il y a au bout de ce processus, un étouffement de l’Etat ; celui-ci ne pouvant plus faire face aux dépenses de souveraineté, il s’entend que les recettes fiscales vont graduellement se réduire comme peau de chagrin avec la disparition progressive du secteur formel.

Alors, la France pourra proposer une nouvelle dévaluation du Franc Cfa. Dévaluation qui pourrait fixer le nouveau taux du Fcfa à 15.000 Fcfa pour 1 euro ; ce sera la grande impasse. Un véritable tsunami économique  et social qui va balayer sur son chemin tous les régimes et gouvernements africains de la zone franc.

Ce n’est plus une hypothèse d’économiste, une prévision vague. Je répète, ce n’est plus un chiffon rouge agité à la face de nos Chefs d’Etat. C’est une certitude basée elle-même sur la  puissance  de la science économique. Pour éviter ce naufrage collectif des économies africaines de la zone franc qui pouvait se produire au cours des dix prochaines années, il n’y a qu’une seule solution : l’intégration régionale, économique et monétaire avec une monnaie unique.

Ainsi pour l’avenir, il faut assumer l’évidence et s’engager résolument en toute responsabilité  et en toute connaissance de cause sur le chemin d’une intégration régionale et monétaire, librement pensée, ardemment voulue et sagement assumée.

Je dois souligner ici que nos Chefs d’Etat sont devenus conscients qu’ils ne pourront jamais réussir à sortir leur peuple de la misère ambiante et de la pauvreté abjecte à cause du Fcfa. Malgré  tous les efforts louables que la plupart d’entre eux font tous les jours, pour bâtir des Nations modernes.

Des lauriers pour le président Boni Yayi

Les différents présidents de la République du Bénin qui se sont succédé dans notre pays, le Bénin depuis le début du Renouveau démocratique, ont beaucoup œuvré pour que  le Bénin devienne un pays où il fait bon vivre. Ayant étroitement collaboré avec ces Chefs d’Etat, je suis un témoin vivant et privilégié pour déclarer qu’ils ne pouvaient pas faire plus dans le carcan que constitue le Franc Cfa. Ils n’avaient pas les moyens financiers de leur ambition pour notre mère patrie.

De même, l’actuel chef de l’Etat, s’échine et se dépense pour que le Bénin devienne un pays véritablement émergent. Il a de grandes ambitions pour notre pays, le Bénin. Mais le système Franc Cfa ne lui a pas permis de concrétiser tous ses rêves pour le Bénin. On doit lui reconnaître d’avoir beaucoup fait pour si peu de moyens dans un pays pauvre comme le Bénin. Le président Boni Yayi n’a pas démérité, loin s’en faut.

Le Bénin n’est pas la Grèce pour avoir les faveurs de la Banque centrale européenne (BCE) et les financements massifs du FMI et de l’Union européenne. Bien que notre pays comme les autres pays africains du Franc Cfa, soient membres rattachés à l’euro. Les pays africains de la zone franc doivent sauter dans le train de la monnaie unique de la Cedeao, la monnaie ECO que les pays anglophones de la Cedeao et la Guinée (Conakry) ont mis sur les rails avec le siège de la Banque centrale à Accra au Ghana.

Il n’y a pas une autre solution, l’intégration monétaire est un mouvement global. L’Europe l’a compris, l’Amérique l’avait compris, l’Asie s’y prépare et l’Afrique de l’Ouest, le Nigeria et le Ghana et les autres pays en dehors des pays du Franc Cfa, ont déjà créé la deuxième zone monétaire de la Cedeao appelée ZMAO (la Zone monétaire de l’Afrique de l’Ouest). Si les pays Franc Cfa tardent à rejoindre ce mouvement d’intégration monétaire d’intégration monétaire avec une monnaie unique, c’est notre pays le Bénin qui risque d’être pris en sandwich avec une accentuation  de la paupérisation déjà lourde.

« La rupture avec le système Franc Cfa, ne doit pas être un aventurisme monétaire »

La rupture avec le système Franc Cfa ne doit pas être comprise comme une rupture avec la France. Il faut plutôt amener la France à accompagner la naissance de la monnaie unique de la Cedeao. De même, la rupture avec le système Franc Cfa, ne doit pas être comprise non plus, comme un aventurisme monétaire, où chaque pays de la zone franc pourra décider de battre sa propre monnaie ; ce serait suicidaire pour l’économie nationale de chacun et de tous. Par ailleurs et pour finir, c’est l’économie réelle qui s’effondrera dans un plus bref délai.

En effet, comme si les malheurs du Franc Cfa arrimé à l’euro ne suffisait pas, l’a l’allie, le coup de grâce, en un mot, le chaos fatal à l’économie béninoise viendra de l’économie réelle avec la construction par le Nigeria à la frontière du Bénin à Badagry de plus grand port en eau profonde de toute l’Afrique. Les travaux de ce port de Badagry sur plus de 1200 ha et d’un coût total de plus de 2 milliards de dollars commencent en septembre 2015.

Ainsi, le Port de Cotonou, le seul poumon de notre économie nationale va petit à petit mourir de sa plus belle mort ; car devenant redondant.

Que faire ?

Il faudra que la politique nostalgique de gestion des intérêts extérieurs au profit de l’extérieur, cède vite la place à la politique de gestion des affaires du Bénin dans l’intérieur supérieur du Bénin par les Béninois et pour les Béninois.

Votre mot de fin

Au total, je réitère ma foi en une Cedeao des peuples, une Cedeao fédérale avec une monnaie unique. C’est la seule voie de sortie, il y en a pas deux. Chers téléspectateurs, je finis en lançant un défi à quiconque, homme politique et autre qui pourra me convaincre que notre pays, le Bénin,  pourra sortir de la misère, de la pauvreté sans rompre avec le système du Franc CFA et très rapidement. Autrement, dans quelques années, l’économie du Bénin disparaitra. Je propose une rupture rapide mais intelligente qui passe par la caution de la France pour une Cedeao puissante, unie et bilingue, préparant ainsi la voie à un partenariat très profitable pour l’hexagone.

Tous ces éléments que je viens de brosser dans cette interview sont détaillés, articulés et documentés dans le livre qui vient d’être publié dans les Editions l’Harmattan à Paris. Un livre de plus de 300 pages en vente en ligne et dans toutes les librairies.

Transcription : Aline ASSANKPON

 (www.youtube.com/watch?v=hR60iFfejB8)

 


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