Les rideaux sont tombés sur la Semaine du Sahel qui a ouvert ses travaux à Cotonou le lundi 04 Décembre dernier. Sous le haut patronage de la CEDEAO et de l’UEMOA la 33ème Réunion annuelle du Réseau de la Prévention des Crises alimentaires (RPCA) qui a rassemblé les principales parties prenantes de la sécurité alimentaire et nutritionnelle de la région a également clôturé ses travaux deux jours à l’avance précisément le mercredi 6 Décembre. Le Comité permanent inter-États de lutte contre la sécheresse dans le Sahel (CILSS) et le Secrétariat du Club du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest (CSAO/OCDE) – tous deux organisateurs de cette semaine) sont repartis sur une note de satisfaction empreinte du tourisme béninois.
La rencontre de Cotonou a été l’occasion de mobiliser à nouveau les actions politiques en vue de replacer l’alimentation, la nutrition et la résilience au cœur des agents nationaux, régionaux et internationaux de développement. Les participants à la 33ème Réunion du RPCA ont eu l’occasion de débattre et d’échanger leurs expériences sur les approches innovantes et territoriales de la sécurité alimentaire et nutritionnelle. Ils ont également fait le point sur la mise en œuvre, les enseignements et les bonnes pratiques de l’Alliance globale pour la résilience (AGIR), la deuxième évaluation externe de la Charte pour la prévention et la gestion des crises alimentaires (Charte PREGEC) et la mise en œuvre de la stratégie de communication du RPCA. Les conclusions de ces travaux stipulent :
La campagne agropastorale a été mitigée, marquée notamment par une fin de saison pluvieuse difficile, lourde de conséquences pour les cultures, le fourrage et les disponibilités en eau pour le bétail. La production céréalière globale est estimée à 68.3 millions de tonnes, supérieure de 4 % à celle de la dernière campagne et de 13 % à la moyenne quinquennale. Cependant, des baisses sensibles sont observées dans plusieurs pays par rapport à la moyenne des cinq dernières campagnes, notamment au Cap-Vert et en Mauritanie. La situation critique dans ces deux pays mérite une attention particulière. L’alimentation du bétail est préoccupante en Mauritanie, au Sénégal, au Mali, au Burkina Faso, au Niger et au Tchad, où une soudure pastorale précoce et très difficile est attendue.
Au regard de la situation alimentaire et nutritionnelle, 5.2 millions de personnes sont en besoin d’assistance alimentaire. Ce chiffre pourrait atteindre 9.6 millions de personnes d’ici la soudure en juin-août 2018, si des mesures appropriées ne sont pas prises, en particulier pour faire face à la crise pastorale qui se profile. Même si la situation s’est relativement améliorée dans le bassin du lac Tchad, l’urgence alimentaire y prévaut toujours. La prévalence de la malnutrition aigüe globale dépasse le seuil d’urgence de 15 % dans certaines régions de la Mauritanie, du Mali, du Tchad et du nord-est du Nigéria. La situation pourrait s’aggraver du fait de l’inflation et de ses conséquences sur l’accès alimentaire ; en particulier au Ghana, au Libéria et Nigéria dont les monnaies ont été dépréciées.
Les recommandations
Dans ce contexte, les membres du Réseau recommandent : le maintien de la veille et de l’effort d’assistance alimentaire et nutritionnelle aux populations affectées dans la zone du bassin du lac Tchad, y compris des actions structurantes de réhabilitation ; l’organisation, au plus tard en février 2018, d’une concertation régionale sur la soudure pastorale et agropastorale afin d’évaluer l’ampleur de la crise pastorale et de définir des plans de réponse appropriés, y compris l’accélération de la mise en œuvre de la composante ‘aliment-bétail’ de la réserve régionale de sécurité alimentaire et la préparation du départ anticipé des animaux pour la transhumance transfrontalière ; l’accélération de la vulgarisation des instruments d’évaluation des ressources pastorales et le renforcement des indicateurs de vulnérabilité pastorale dans les analyses du Cadre harmonisé ; le renforcement des mesures de prévention et de gestion des maladies ravageuses des plantes, en particulier la chenille légionnaire. Au regard de la situation alimentaire et nutritionnelle critique au Cap-Vert et en Mauritanie, le Réseau appelle la communauté internationale à soutenir les efforts déployés par les États concernés dans la mise en œuvre de leurs plans de réponse.
Par ailleurs, les participants recommandent aux gouvernements et à leurs partenaires de soutenir la mise en œuvre d’une gouvernance locale inclusive de la sécurité alimentaire et nutritionnelle, fondée sur le dialogue et l’initiative des acteurs locaux, ruraux comme urbains. Ils soulignent l’importance d’une approche territoriale de l’économie alimentaire afin d’en optimiser les potentiels en termes de croissance et d’emplois. L’économie alimentaire pèse au moins 260 milliards de dollars, soit 39 % du PIB régional et fait vivre 82 millions de personnes, soit 66 % des emplois directs. Les membres du Réseau invitent les États et leurs OIG, à investir dans la durée, dans des politiques volontaristes de développement et de renforcement des chaînes de valeur agro-alimentaires, en particulier les segments faibles ou manquants de la transformation agro-alimentaire et de la distribution. Ils insistent sur la nécessité de positionner l’économie alimentaire au coeur des stratégies nationales, régionales et internationales de création d’emplois, en particulier l’emploi des jeunes et des femmes ; y compris dans les initiatives de stabilisation et de développement du Sahel.
Aline ASSANKPON
Banjul, la capitale de la Gambie est retenue pour accueillir la 34ème Réunion annuelle du RPCA les 3, 4, et 5 Décembre 2018.