A la faveur de la relance économique du Togo axée, en partie, sur la mise en valeur du potentiel minier, le marbre et le calcaire ont retrouvé leurs lettres de noblesse. Pendant que le robuste gisement de marbre blanc de Pagala, compétitif avec la référence mondiale italienne, est entré dans le viseur des fonds espagnols, les fonds indiens et allemands ont jeté leur dévolu sur le potentiel de calcaire.
Dans la bourgade de Pagala, à 260 km au nord de Lomé, le marbre est en affleurement, sous formes de rochers aux éclats ternis par des années d’exposition aux intempéries, sur plus de 800 000 m2. Le gisement est intercepté même à plus de 100 m de profondeur et laisse supposer des siècles d’exploitation. C’est sur ce potentiel jugé époustouflant que Pierres ornementales et marbres (POMAR- Togo), une société que détiendrait à 67% des investisseurs espagnols, a démarré l’exploitation portant, dans un premier temps, sur l’extraction d’une réserve de plus de 50 millions de m3. Ce marbre de Pagala maintiendrait, selon les promoteurs du projet, sa qualité intacte même exposé constamment aux intempéries pendant plus de 40 ans et aurait une bonne similitude avec le marbre italien de Carrare, une référence mondiale en exploitation depuis l’époque romaine. L’immensité et la qualité du gisement rassurent de la viabilité économique du projet qui a convaincu les institutions financières communautaires la BOAD et la BIDC. Elles ont investi, chacune, 5 milliards de francs Cfa dans ce projet d’extraction, d’exploitation du marbre, couplé d’une usine de transformation, et axé sur la commercialisation des pierres ornementales et produits dérivés. De sources proches de ces institutions, c’est un projet de « grande envergure » qui, de par le dimensionnement des activités d’extraction, soit 250 000 m3, et les potentialités des gisements, tant en quantité qu’en qualité, va contribuer de façon significative à créer de l’emploi et relever la qualité de vie des populations. L’entrée en exploitation de ce gisement marque, de fait, la renaissance de la filière marbre au Togo, près de trente ans après la faillite de la Société togolaise de marbrerie (SOTOMA) qui avait mis en valeur, entre les années 1970 et 1984, le gisement de marbre dolomitique de Gnaoulou et celui de Pagala.
La même ferveur a cours sur le potentiel de calcaire dans la préfecture de Yoto, à près de 80 km au nord-est de Lomé où, après cinq années d’exploitation du calcaire de la ville de Tabligbo à partir de 1980, la société Ciment de l’Afrique de l’ouest (CIMAO), une joint-venture née d’un traité international le 12 décembre 1975 entre le Togo, le Ghana et la Côte d’Ivoire, a fermé ses portes pour défaut de rentabilité. Cette société, « expression vivante de la politique d’intégration africaine », devant produire le matériau nécessaire à la mise en œuvre des politiques des grands travaux, « n’a pu faire l’objet de l’orthodoxie qu’auraient souhaitée ses pères fondateurs », relève-t-on au niveau du ministère des mines. En 1996, ses actifs ont été cédés à West African Cement (Wacem), société à capitaux indiens, qui a relancé l’exploitation du gisement de calcaire et alimente en partie en clinker la société Cimtogo, une filiale du groupe allemand Heidelber Cement.
A Sika-Kondji, à quelques kilomètres de la ville de Tabligbo, le groupe allemand, qui chercherait une certaine sécurité de son approvisionnement en clinker, a entamé une aventure sur un autre gisement de calcaire. Il a obtenu, via la filiale Scantogo-Mines, une licence d’exploitation à grande échelle du calcaire pour produire du clinker et fabriquer du ciment sur place dans un complexe industriel dont le coût global est estimé à 258 millions de dollars.Heidelberg Cement a alors financé, entièrement sur fonds propres, l’usine de production de clinker, d’une capacité de 5000 tonnes de clinker par jour, et a confié la construction au groupe chinois Chengdu Design Institute (CDI) qui est à l’œuvre depuis 2012 et devrait livrer bientôt l’ouvrage pour faire place à la première production de clinker attendue, apprend-on, vers la fin de l’année 2014.
L’effervescence sur le potentiel du calcaire togolais alimente en clinker Cimtogo, Wacem et Diamond Cement, un important marché de trois acteurs de la production de ciment au Togo, pays qui a renoué avec les grands travaux publics. Parallèlement, un engouement, jamais observé auparavant, s’est progressivement développé en matière d’investissement dans le bâtiment avec une forte préférence aux granulats et concassés. C’est le début d’un marché très prometteur, né à l’ombre de celui des graviers-alluvionnaire. La société Togo-Carrière y a cru, a investi dans l’exploitation des roches de type granitique, dans la zone de Lilikopé-Agbélouvé, et produit des granulats et agrégats concassés très en vogue dans les bâtiments, aujourd’hui, et couramment utilisés dans travaux publics dont les routes, les ouvrages d’art et les ballasts ferroviaires. La voie était ainsi balisée pour ce secteur, apparemment très porteur. Le groupe allemand Heidelberg Cement s’y aventure avec une autre filiale, Granu-Togo.