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Commerce international / Entretien avec la Directrice exécutive du Commerce international à l’OMC, Mme Arancha Gonzalez : « L’essentiel est de miser sur la qualité, le marché, l’amélioration, l’innovation et l’utilisation de la science appliquée à l’agriculture »


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Mme la Directrice exécutive du Centre international du Commerce, a pris une part très active aux différents travaux entrant dans le cadre de la Conférence des PMA. Durant les trois jours elle a présenté des communications tant aux sessions plénières que des sessions parallèles et panels de haut niveau, notamment, la chaîne des valeurs mondiales, l’importance de la recherche agricole pour la production et l’emploi, le Cadre intégré renforcé (CIR) : un partenariat à l’œuvre pour le renforcement des capacités productives des PMA pour ne citer que ceux-là.

Mme Arancha Gonzalez, Directrice exécutive du Centre international du Commerce à l'OMC

Mme Arancha Gonzalez, Directrice exécutive du Centre international du Commerce à l’OMC

L-integration : Est-ce votre première visite au Bénin ?

Mme Arancha Gonzalez : Ce n’est pas ma première visite au Bénin, j’ai déjà visité le pays dans le passé mais ma première visite officielle en tant que Directrice exécutive du Centre international du Commerce dont l’acronyme en anglais donne ITC.

C’est quoi l’ITC et quels sont les objectifs de votre agence ?

L’ITC est une agence de développement qui a des particularités. D’abord nous avons deux parents : un père qui s’appelle Organisation mondiale du commerce (OMC) et une mère qui s’appelle Nations Unies. De cette particularité, nous sommes une agence de développement qui aide les petites et moyennes entreprises à exporter. Alors nous sommes une agence pour les secteurs privés. Notre rôle, c’est transformer des possibilités commerciales qui existent grâce aux négociations commerciales, que ça soit à l’OMC ou dans le contexte régional comme la Cedeao ou  l’Uemoa. Il s’agit de transformer tous les potentiels existants dans les flux commerciaux réels pour les entreprises.

En 2014, nous célébrons 50ème anniversaire. Evidemment en de moments de célébration forts, pour le Centre international de commerce (CIC), c’est de célébrer ces 50 ans à Cotonou (au Bénin) dans une conférence du genre, sur comment aider les Pays les moins avancés (PMA) dont le Bénin, à tirer un meilleur profit du commerce international, en développant les capacités productives sur place ? C’est un peu le thème de cette conférence et ce qui justifie ma présence ici.

Je veux aussi témoigner du compromis, de l’engagement du CIC pour les PMA ; il faut savoir que 60% de nos activités se passent en Afrique subsaharienne et sur les PMA. Par exemple, à la séance d’ouverture de cette conférence, j’ai donné mon engagement personnel à augmenter ces 60% dans les trois prochaines années. Ces trois ans sont relatives à notre plan stratégique d’augmenter notre assistance vis-à-vis des PMA et de l’Afrique subsaharienne.

Quel est le contenu de votre plan stratégique ?

Notre philosophie de base, c’est simple. Nous pensons que le commerce peut être un vecteur de croissance et d’emploi. Mais surtout, il faut aider les petites et moyennes entreprises même les micros entreprises à pouvoir participer à ce commerce international pour générer de l’emploi. Dans ce contexte, il y a de l’emploi pour les femmes qui constituent une grande partie des petites et moyennes entreprises. Bien évidemment, il y a une énorme composante d’emplois pour les jeunes parce que ces petites et moyennes entreprises sont des réservoirs d’emplois de jeunes.

Comment aidez-vous alors les petites et moyennes entreprises à exporter plus et mieux ?

En gros, nous faisons cinq choses : Premièrement, nous apportons la connaissance des marchés, l’intelligence commerciale, pour pouvoir exporter, il faut savoir où et quoi ? Il faut savoir également avec quelle condition. Nous travaillons pour doter les pays en voie de développement des outils pour savoir quels sont les marchés de destination, des débouchés, services ou produits qu’ils peuvent fournir.

Deuxième volet, nous travaillons avec les petites et moyennes entreprises pour améliorer la compétitivité. Ce qui veut dire qu’on travaille sur l’emballage ; la qualité, (surtout quand on est dans l’agro-alimentaire ; si on n’investit pas dans la qualité, on ne peut pas accéder aux marchés des pays tiers).  Parce qu’il y a les normes standard de qualité, de certification et des normes sanitaires qui sont assez élevées ; sur l’étiquetage ; sur le brading comment on peut se présenter sur le marché quand il y a d’autres pays qui fournissent le même produit ? C’est tout cela que nous mettons dans ce deuxième volet appelé, la compétitivité des PMA.

En troisième, nous connectons ces PMA aux marchés internationaux en commençant bien sûr par les marchés régionaux. Nous les aidons soit en utilisation les moyens technologiques ; soit par la participation à des séances Achat-Vente.

En quatrième point, nous travaillons énormément avec les institutions d’appui au commerce, les Chambres de commerce, les Associations de promotion d’investissement, les collectivités des producteurs, les coopératives, etc, pour que ces derniers puissent faire notre relais avec les petites et moyennes entreprises qui en font partie. C’est pourquoi au Bénin, nous nous rapprochons de l’ABePEC pour discuter avec les associations béninoises des producteurs pour comprendre comment on peut mieux les assister.

Enfin, nous travaillons aussi avec les gouvernements des pays en voie de développement pour améliorer les cadres d’affaires, la manière dont les politiques commerciales et les politiques qui sont autour du commerce international peuvent être changées, modifiées, pour favoriser un environnement d’affaires qui puisse aider les petites et moyennes entreprises.

Peut-on avoir idée sur votre intervention ou assistance aux petites et moyennes du Bénin ?

Au Bénin, nous avons beaucoup travaillé  notamment sur trois filières : les noix de cajou, l’ananas et le coton. Et on a fait toutes ces cinq choses que je viens de décrire avec des résultats concrets sur le terrain. Je l’ai dit dans l’un des panels que cela de la théorie, nous ne sommes pas une organisation diplomatique avec des discussions théoriques. Nous sommes là pour aider à la création d’emploi et  à la croissance.

Dans le cas des noix de cajou, nous avons beaucoup travaillé pour améliorer la compétitivité de la filière béninoise, à regrouper les producteurs dans les coopératives, mais aussi à trouver des marchés d’exportation et là, on a aidé les producteurs béninois à exporter vers le Vietnam.

Dans le cas d’Ananas, c’est la même démarche : amélioration de la qualité, regroupement des producteurs, etc ;  on a réussit à trouver des débouchés d’exportations dans la sous-région et au Maroc. Je vous donne ces exemples pour vous confirmer que tout cela n’est pas théorique. C’est pour cela que le Bénin a choisi le Centre international du Commerce (ITC) pour un nouveau projet de 4 millions de dollars US qu’on vient de lancer (ndlr : ce 28 Juillet 2014 en marge de la Conférence des PMA)

Nous allons entamer ce nouveau projet du Cadre intégré renforcé (CIR) avec l’Agence des Nations Unies pour l’Industrialisation (ONUDI) et la Conférence des Nations Unies pour le Commerce et le Développement (CNUCED). C’est un projet pour améliorer les capacités productives au Bénin. Alors là, mes démarches ont abouti et on  va travailler au niveau macro avec le gouvernement pour élaborer des politiques commerciales et des cadres des affaires qui puissent aider les producteurs au Bénin ; au niveau meso, on va travailler avec les institutions d’appui au commerce au Bénin et au niveau micro, on va réhabiliter et mettre à niveau, des entreprises, des sous-secteurs identifiés  en vue de l’amélioration des traitements et transformations et la mise en conformité avec les normes des produits exportables.

Cette fois-ci, nous allons travailler sur trois filières : la pêche, le coton et l’agro-industrie. Ce projet de trois ans est une priorité pour nous dans l’Afrique de l’Ouest, sachant que le Bénin est un de nos partenaires prioritaires. Il est important d’investir dans le secteur agricole et agroalimentaire quand on cherche une démarche d’industrialisation. De nos échanges, nous avons retenu qu’il est important de focaliser l’investissement dans le secteur agricole pour les pays comme le Bénin qui aspire à aller vers l’industrialisation, surtout dans l’agro-transformation et l’agro-industriel.

Tirant conclusion de ce que j’ai retenu des autres expériences venant de la Nouvelle Zélande, de l’Australie et autres, on peut développer un pays sur la base de l’agricole. L’essentiel est de miser beaucoup sur la qualité, le marché d’exportation, l’amélioration, l’innovation et l’utilisation de la science appliquée à l’agriculture.

Vous avez évoqué les 50 ans de votre institution prévus pour cette 2014, au Bénin ou ailleurs ?

C’est un événement annuel que nous célébrons depuis 1964 et pour la première fois, l’événement  sera célébré en Afrique, précisément les 15, 16 et 17 septembre 2014 à Kigali au Rwanda. On va se focaliser sur les PME (Petites et moyennes entreprises) créatrices d’emplois et de croissance.

Un mot sur le Cadre intégré renforcé (CIR)

Le Cadre intégré renforcé (CIR) est la plateforme des coordinations la plus adaptée pour répondre aux besoins des PMA dans le domaine de l’assistance technique liée au commerce. Le Bénin est un pays ami de l’ITC et le cadre intégré est l’un des projets phares vers lesquels l’ITC a contribué à renforcer les capacités productives et commerciales du Bénin. Et quand je dis Bénin, je pourrais bien dire Tchad, Niger, Liberia, Rwanda, Nepal, Bengladesh, Haïti, Zambie, etc, la liste est bien longue. Car en réalité, l’ITC est l’ami des PMA. A travers le programme du CIR, nous avons accompagné le Bénin pour être à niveau, ses capacités productives au niveau des filières à fort potentiel d’exportation, comme c’est le cas des noix de cajou, de l’Ananas et du manioc.

Quelle est la méthode de travail de l’IT ?

La méthode de travail de l’ITC se passe comme suit : Un : fournir un meilleur accès à l’information commerciale, puisqu’il faut d’abord savoir où se trouve les marchés. On commence toujours à partir du marché et on travaille en arrière pour construire les capacités productives et non pas à l’envers ; car on court le risque de produire quelque chose qui n’intéresse pas le marché. Donc, on part du marché, scanner le marché, cherché à savoir qui est ce marché ? Deux : travailler sur la qualité du produit. Qui dit la qualité, c’est l’emballage, l’étiquetage, l’innovation sur le produit ; Trois : travailler sur le marketing et la commercialisation ; quatre : travailler sur l’accès au crédit et cinq : Aider les entreprises et les associations de producteurs à s’associer aux manifestations commerciales.

Ensuite, il faut se positionner dans les marchés régionaux qui comportent d’énormes potentiels qui sont en pleine croissance surtout en Afrique de l’Ouest. Mais on peut aussi passer au marché plus global, le marché international.

Dans le cas de ces trois filières que j’ai décris tout à l’heure, nous avons eu des résultats, comme l’exportation d’Ananas du Benin vers le Maroc ; des noix de cajou du Bénin vers le Vietnam, donc ça marche.

Nous avons travaillé avec des associations, des coopératives de producteurs et d’exportateurs, car la seule manière de pouvoir avoir une offre exportatrice, c’est bien de regrouper les petits producteurs. Nous avons travailler pour améliorer le contenu de l’offre pour la rendre plus compétitive pas simplement en matière de prix mais aussi en matière de qualité.

Les interventions de l’ITC ont été possible parce qu’il y avait un appui de partenaires sur le terrain. Au premier rang de ces partenaires, c’est les ministères du commerce et les cellules Cadre intégré renforcé. Outre les ministères, il y a bien évidemment les institutions d’appui au commerce, dans le cas du Bénin, nous avons l’Agence béninoise de promotion des échanges commerciaux (ABePEC) qui n’a ménagé aucun effort pour mobiliser les secteurs privés autour des projets structurants et novateurs.  L’ABePEC a été le bras opérationnel de l’ITC auprès du secteur privé. Et en renforçant les capacités institutionnelles de l’ABePEC, l’ITC à aider cette agence à aider en retour les PMA. Et qui dit, l’ABePEC pourrait dire les Chambres de Commerce, les coopératives, les associations des femmes, etc.

Pour que le Cadre intégré soit un outil efficace au service de renforcement des capacités productives, il est donc important que les acteurs nationaux ainsi que les partenaires au développement conjuguent leurs efforts. C’est cette approche de concertation et de complémentarité qui a été privilégiée au Bénin avec ce nouveau qui vient d’être lancé.

Nous allons combiner l’expertise des trois agences du CIR avec l’expertise béninoise pour créer des synergies et des complémentarités en cherchant surtout l’impact. Cet impact n’est pas simplement un mot mais une réalité. C’est une finalité, cette recherche d’impact. L’impact pour nous, c’est la réduction de la pauvreté auprès des populations qui sont les plus vulnérables.

C’est pourquoi je continuerai à faire un plaidoyer pour que les programmes CIR doit être maintenu au-delà de 2015 et que des fonds additionnels soient mobilisés parce qu’on a déjà une longue liste de projets qui attend l’approbation. Tout ceci pour vous dire que je suis engagée et rassurée de ce que j’ai vu sortir de l’Agenda post Développement 2015 à New-York où le CIR est mentionné explicitement grâce à l’effort de tous les gouvernements qui siègent aux Nations Unies. Il faut continuer à les appuyer.

On ne pourra pas finir de si tôt avec le CIR, par exemple, l’Afrique produit 25% des cuirs et des peaux au monde et ne transforme que 12 % de ces cuirs et peaux. Parce que le détail se perd à travers la manière dont on tue les animaux abîme les cuirs et les peaux. Encore pire, la valeur ajoutée des cuirs et peaux en Afrique ce n’est que de 2%. Or entre 25% et 2% de la valeur ajoutée, il y a encore du chemin à faire. Alors il faut travailler ensemble, coude à coude pour nous assurer qu’il y aura une nouvelle phase  de Cadre intégré renforcé pour qu’on aide à créer des chaînes de valeurs avec de la valeur ajoutée en Afrique.

Et si on parlait de la mécanisation agricole

La mécanisation agricole est une démarche de qualité et de production améliorée. C’est essentiel en matière agricole car beaucoup de récolte sont perdues parce qu’elles ne sont ni transformées, ni une capacité de transformation locale, etc. Il y a quand même d’autres filières dont on peut améliorer la qualité et la production pour avoir accès au marché international plus facilement. Il y a des cultures comme le coton où on trouve que si la plante est trop contaminée par des impuretés, ses feuilles par exemple, ça va être beaucoup plus coûteuse. D’où une énorme envolée très large de l’amélioration de la qualité qui passe aussi par l’amélioration de la mécanisation.

Propos recueillis : Aline ASSANKPON


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