La dernière réunion des ministres des Finances de la zone franc, qui s’est tenue le 9 avril 2016 à Yaoundé, au Cameroun, a une nouvelle fois donné à voir le développement déséquilibré des économies constituées par cette espace monétaire.
Selon le rapport des experts réunis la veille de la rencontre des ministres, la conjoncture économique actuelle n’impacte pas de la même manière les huit pays de l’Uemoa (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée Bissau, Mali, Niger, Sénégal et Togo) et les six pays de la Cemac (Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, RCA et Tchad), même si ces deux espaces communautaires font usage de la même monnaie : le franc Cfa.
Ainsi, alors que la croissance économique dans l’espace Uemoa a culminé à 6,5% en 2015 et est même annoncée à un peu plus de 7% en cette année 2016, dans la zone Cemac, c’est la dégringolade depuis l’année dernière. De 4,8% en 2014, la croissance économique dans l’espace Cemac a culminé à 2,8% en 2015, en baisse de 2%. En 2016, selon les prévisions officielles, elle est projetée à 2%, soit 5% de moins que les prévisions dans la zone Uemoa.
A l’origine de ce décalage, ont expliqué les experts de la zone franc, il y a d’abord le niveau d’intégration dans les deux espaces. Dans la zone Uemoa, la libre circulation des hommes et des biens en vigueur depuis des années favorise le développement des échanges commerciaux intra-communautaires, les propulsant à 10% en 2014. Dans le même temps, les six pays de la Cemac affichent un volume d’échanges intra-communautaire de 3% du PIB, parce qu’il est impossible pour les ressortissants de cet espace de voyager sans visa dans la plupart des cas, malgré un discours politique magnifiant une intégration sous-régionale qui semble s’être muée en serpent de mer.
Ensuite, ont également conclu les experts de la zone franc, le décalage des performances économiques observé entre les pays de l’Uemoa et ceux de la Cemac est étroitement lié au niveau de diversification des économies dans les Etats des deux espaces communautaires. De ce point de vue, dans la Cemac, où seul le Cameroun revendique une relative diversification de son tissu économique, les économies des Etats-membres dépendent étroitement de la production pétrolière, dont cinq des six pays de la communauté sont producteurs. En Guinée équatoriale, par exemple, les recettes pétrolières représentent jusqu’à 85% de l’enveloppe budgétaire nationale.
Dans le même temps, dans l’espace Uemoa, où les réalités géographiques et climatiques ne sont pas toujours des plus avantageuses, les gouvernants ont réussi à implémenter d’ambitieux programmes d’investissement dans le secteur de l’agriculture. Selon les experts de la zone franc, ce secteur fait partie des moteurs de la croissance économique dans la zone Uemoa, à côté des infrastructures, de l’immobilier, du commerce et des télécommunications. Autant de domaines dans lesquels des pays de la Cemac présentent pourtant plus d’avantages comparatifs par rapport à ceux de l’Uemoa. (Agence Ecofin)