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Addis Abeba: temps forts des printemps économiques africains


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Arrêtons de rêver et jetons-nous à l’eau!» Cette phrase du président Paul Kagamé a retenti dans la grande salle du building des Nations Unies qui a abrité l’ouverture de la conférence des ministres africains des Finances durant la matinée du 30 mars 2014.

Ph:Dr- : Partisan de la mobilisation des ressources intérieures à travers notamment les marchés financiers régionaux, Kagamé appelle l’Afrique à s’approprier son développement

Ph:Dr- : Partisan de la mobilisation des ressources intérieures à travers notamment les marchés financiers régionaux, Kagamé appelle l’Afrique à s’approprier son développement

Face à son homologue Kenyan, Uhuru Kenyatta, au premier ministre éthiopien, Hailé Mariam Desalgn, au secrétaire général de la Commission Economique africaine, Carlos Lopes, à la présidente de la Commission de l’Union Africaine, Dlamini Zuma et au ministre mauritanien des Finances, El Mocktar Ndiaye, le président rwandais a évoqué l’agenda 2063 avec une approche simple et pragmatique. «Il est important que d’entrée de jeu, nous définissions la voie pour que l’Afrique avance, soit forte, stable. prospère et traitée au même pied d’égalité que les autres à l’international».
Partisan de la mobilisation des ressources intérieures à travers notamment les marchés financiers régionaux, Kagamé appelle l’Afrique à s’approprier son développement.«L’on ne peut ressentir un impact fort que si nous décidons ce que nous voulons faire. Nous serons ainsi mieux placé pour nouer un partenariat avec l’autre. Cette nouvelle dynamique va libérer les énergies». Pour l’homme fort de Kigali qui met en garde les dirigeants contre l’excuse habituelle de “nous n’avons pas les moyens”, «l’objectif d’unité sera réalisée immédiatement si nous décidons de resserrer nos liens».
Et de prendre l’exemple de l’Afrique de l’Est qui, en moins de deux ans, a vu le projet du Corridor Nord conduire à une libre circulation effective. «Ce qui manque pour réaliser l’agenda 2063, c’est un sentiment d’urgence et d’appropriation. On voudrait encore que quelqu’un d’autre vienne le faire à notre place?».
Le Rwanda qui a levé les visas en directions de tous les pays africains ainsi que les tarifs téléphoniques en roaming fera-t-il des émules ? Peut-on aller à l’agenda 2063 dans un contexte de morcellement physique, monétaire et financier?
Pour le secrétaire exécutif de la Commission économique africaine (CEA), Carlos Lopes, les pays africains présentent un niveau élevé de protectionnisme entre eux. «Les coûts prohibitif des échanges, les barrières tarifaires et non tarifaires restent des obstacles au commerce africain». D’ailleurs, le rapport économique africain au titre de l’année 2015, lancé le 29 mars, rappelle la baisse tendancielle de la part de l’Afrique (3,3% en 2014) dans le commerce mondial depuis les années 80 alors que celle de l’Asie a explosé. Face à une économie en forte progression depuis quinze ans mais caractérisée par une faible transformation (18% seulement des produits exportés sont manufacturés), le continent reste à la merci des chocs exogènes et des retournements cycliques des cours de matières premières. L’industrialisation, thème central des quatre dernières éditions du rapport économique, est le seul moyen de briser cette dépendance. La nouveauté dans le rapport 2015 est le lien entre industrialisation et commerce, l’un stimulant l’autre.
Or, l’Afrique, analyse M.Lopes, présente des politiques commerciales et industrielles déconnectées les unes des autres. La plupart des pays pratiquent un niveau de protectionnisme élevé dicté par la recherche de la rente. «Les droits de douane pèsent sur la compétitivité africaine et ne stimulent pas la réaction des fournisseurs en amont. Il nous faut du protectionnisme intelligent, faire en sorte que les règles nous servent.»
En outre, M. Lopes appelle à l’intégration du secteur des services dans les négociations sur la zone continentale de libre-échange. Cela créera «des chaînes de valeur au niveau des services, permettant au continent d’améliorer sa compétitivité au niveau global».
Pour tirer le meilleur parti du commerce, les pays africains doivent faire de telle sorte que l’échelonnement de la libéralisation privilégie la suppression des droits de douane inter-africains. «Notre objectif c’est d’avoir des droits de douane réduits entre pays africains et entre zones économiques», poursuit M. Lopes.
Faisant sans doute allusion aux accords de partenariats économiques signés récemment avec l’UE, le secrétaire général exécutif de la CEA, appelle à la prise de conscience: « Rendons-nous à l’évidence. Nous ne pouvons pas négocier des accords commerciaux comme si l’industrialisation n’était pas une préoccupation».
Les deux interventions de Kagamé et de Lopes préconisent pour l’essentiel la prise de risque et la prise en charge du développement de l’Afrique par elle-même. Pour conclure le débat inaugural, le premier ministre éthiopien, Hailé Mariam Dessalgn, mettra l’accent sur la mobilisation des ressources au niveau interne dans un contexte de faible pénétration des services financiers (limités aux villes et ignorant le monde rural) et de faible croissance des recettes fiscales.
Cette conférence des ministres africains des Finances ouverte par El Mocktar Ndiaye, ministre mauritanien des Finances ( le pays nord-ouest africain intervenait au titre de vice président du bureau sortant, la présidence étant assurée par le Nigeria en la personne de la ministre Ngozi Iweala, empêchée) est devenu le cadre de la réflexion stratégique sur l’économie du continent africain. Précédées par plusieurs réunions de comitès spécialisés, d’experts en démographie, en environnement et en finance, du caucus des banques centrales africaines, ces rencontres économiques ont gagné en maturité tant dans la qualité de l’organisation que dans le contenu.

Adama Wade, Addis Abeba

http://www.financialafrik.com/2015/03/31/addis-abeba-temps-forts-des-printemps-economiques-africains/


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