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Entretien avec Mme Caroline Mendy, spécialiste de l’industrie pharmaceutique :  » On ne doit pas demander à l’Afrique de faire des choses que d’autres régions n’ont pas réussi à faire »


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Après une brillante présentation sur le Partenariat pour le renforcement des capacités de règlementations des produits médicaux, Mme Caroline Mendy, en charge de la politique réglementaire au sein de l’IFPMA, la Fédération internationale de l’industrie du médicament en France. revient ici à travers cet entretien sur les grands traits de son exposé.

 

Ph/DR-: Caroline Mendy en charge de la politique réglementaire au sein de l'IFPMA

Ph/DR-: Caroline Mendy en charge de la politique réglementaire au sein de l’IFPMA

L-integration.com : Mme Caroline Mendy, pouvez-vous nous faire un bref résumé de votre présentation sur la contribution des industries pharmaceutiques ?

Caroline Mendy : La thématique concernait le renforcement des capacités en Afrique spécifiquement dans le domaine réglementaire. Je présentais le point de vue de l’industrie pharmaceutique je représente à cette conférence et présenter le type d’activités dans lesquelles nous avons été impliqués dans le passé et celles pour lesquelles nous pouvons apporter du support. L’essentiel que nos compagnies peuvent fournir pour aider à renforcer les capacités, c’est partager l’expertise qu’ils ont non seulement du développement des médicaments mais de toutes les étapes depuis la découverte du médicament jusqu’à sa commercialisation et le suivi après la mise sur le marché.

Mais surtout – justement ce sont des compagnies qui opèrent partout dans le monde, puisqu’elles sont au fait, globales et vendent leur médicament à l’international – donc leur expérience à gérer les différents systèmes réglementaires que ce soit en Asie, Amérique Latine, en Europe et en Afrique.

Spécifiquement en Afrique, on a parlé beaucoup de la diversité des systèmes d’un pays à l’autre. C’est un problème qui existe dans d’autres régions du monde, qui ont une signification bien plus importante qu’en Afrique. Ça ralenti l’obtention des médicaments par les patients. C’est tout le but de travailler sur l’harmonisation réglementaire.

Que dites-vous alors de l’harmonisation des textes de base relatifs à la régulation des dispositifs médicaux ?

C’est essentiel ! Parce que la diversité des textes actuellement, n’est pas nécessairement justifiée. C’est pour ça qu’en fait, pour nous, on se bat pour que, quel que soit le texte, il faut qu’il soit justifié scientifiquement, qu’il faille du sens et que tout le monde se plie au texte. Il n’y a pas de raison qu’un pays A impose un texte B par exemple pour le même dispositif médical.

Le but, étant de déterminer quels sont les textes essentiels pour assurer qu’un dispositif médical efficace soit sûr et que du coup, le patient qui le prend soit en parfaite confiance avec ce qu’il prend. Et ce qu’on souhaite, qu’il y ait cette discussion entre les Régulateurs, pour revoir leurs critères et éliminer ceux qui ne sont pas justifiés et garder bien évidemment ceux qui doivent assurer la sécurité, la qualité et l’innocuité des médicaments.

A cette conférence nous avons eu droit au partage des expériences pays. Vos impressions?

Malheureusement, on se rend compte de la disparité enfin de compte d’un pays à l’autre. Il y a beaucoup de raisons derrières. Il y a aussi la caractéristique du continent par rapport à d’autres continents, où en fait la population est un peu plus harmonisée. Les pays ont des tailles qui sont un peu similaires. Vous avez des pays qui vont avoir des populations massives comme en République Démocratique du Congo (RDC) et des pays beaucoup plus petits comme la Gambie, qui peuvent avoir à gérer les mêmes types de problèmes de santé mais pas à la même échelle. Et le problème, dans la mesure où les ressources manquent pour tous les pays, il n’y pas un pays qui est mieux que les autres ; cela a plus d’impact pour les patients et cela s’observe au niveau du partage d’expérience.

Alors pour moi, c’est le genre de discussion qui m’est plus de valeur, par exemple j’ai plus d’intérêt à suivre les expériences pays où la réalité des choses transparait que de rester dans la théorie et présenter des schémas qui sont très bien sur le papier, qui au final en pratique ne veulent pas dire grande chose.

La diversité des systèmes ralenti l’obtention des médicaments par les patients »

Si vous devez formuler des recommandations, que diriez-vous ?

J’invite à continuer le partage des expériences, à travailler ensemble (tout le monde l’a dit) ; mais il faut vraiment le faire de façon concrète. Malheureusement après des meetings comme ceux-là, les gens retournent dans leur pays et gèrent leurs obligations quotidiennes. Mais il ne faut pas oublier que c’est important de travailler avec les autres. Justement dans un contexte où les ressources sont limitées, c’est en travaillant avec les autres qu’on va apprendre à collaborer et à se partager les tâches ; surtout dans un contexte où les produis circulent maintenant dans tous les pays. C’est là où justement, la mutualisation des expertises est importante.

Donc ma première recommandation, c’est continuer à parler ensemble, il y a des structures régionales qui ont été mises en place, les pousser vraiment pour que ça deviennent des plateformes de discussions et d’échanges de bonnes pratiques ; sans ça, on n’y arrivera pas !

Ph/DR-: "La diversité des systèmes ralenti l’obtention des médicaments par les patients » dixit Caroline Mendy

Ph/DR-: « La diversité des systèmes ralenti l’obtention des médicaments par les patients » dixit Caroline Mendy

Malheureusement, le continent africain a trop de pressions au niveau santé, trop de défis à relever, et on ne peut pas se permettre de passer trois semaines dans une réunion comme celle-là, et finalement à la maison, ne pas en tenir compte. Des plateformes comme celles-là, c’est important, mais il faut qu’il veuille dire quelque chose.

Aussi, il faut un peu d’indulgence avec l’Afrique, certes il y a une urgence, mais il faut reconnaitre que les autres continents ont mis pratiquement 50 fois plus de temps à se mettre en place. Les présentations de l’Europe ont pris 50 ans pour arriver à l’harmonisation.

Autrement dit, l’Afrique progresse ?

Bien sûr, l’Afrique progresse ! Les projets d’harmonisation ont réellement commencé en 2009 dans les premières discussions. On est en 2015, donc six ans après, on a déjà des résultats excellents. Aux Européens, ça leur a pris 50 ans pour arriver à quelque chose de bien plus élaboré.  On ne doit pas demander à l’Afrique de faire des choses que d’autres régions n’ont pas réussi à faire.

Propos recueillis : Aline Assankpon


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