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Conférence africaine sur la dette publique à Lomé : «Face à ces vents contraires, nous n’avons d’autres choix que de tracer une nouvelle voie audacieuse et fondée sur des principes » dixit le Secrétaire général adjoint des Nations Unies, Claver Gatete


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PH:DR: M. Claver Gatete, Secrétaire général adjoint des Nations Unies, Secrétaire exécutif de la CEA

« Cette conférence sur la dette publique ne pourrait être plus opportune. Sur l’ensemble du continent, l’accès aux financements concessionnels se réduit, tandis que le escalades tarifaires affaiblissement l’accès aux marchés pour les produits africains», c’est en ces termes que M. Claver Gatete, Secrétaire général adjoint des Nations Unies et Secrétaire exécutif de la CEA, plante le décor dans son intervention à la cérémonie d’ouverture de la conférence sur la dette publique.

Aline ASSANKPON

Pour nombre de nos pays, des coûts d’emprunt plus élevés, des recettes d’exportations réduites et des budgets plus serrés, à un moment où l’expansion budgétaire est essentielle pour une croissance inclusive.

« En effet, au moment où nous nous réunissons, l’Afrique n’est pas simplement confrontée à une crise de la dette, elle est confrontée à une crise du développement – une crise où le service de la dette est en concurrence directe avec la santé, l’éducation, les infrastructures et le droit fondamental au développement » souligne Gatete en posant la question suivante : « De quel type de solution avons-nous besoin – et avec quelle urgence pouvons-nous l’apporter ? »

En réponse, Gatete commence par des faits (ou des chiffres) qui donnent à réfléchir : En 2024, la dette publique totale de l’Afrique atteindra 1,86 trillion de dollars, avec des ratios moyens dette/PIB passant de 44,4 % en 2015 à 66,7% aujourd’hui. « La dette, lorsqu’elle est maîtrisée et orientée vers des investissements productifs, est un levier de croissance ; mal gérée, elle devient un piège pour les générations futures. »

En 2024, la dette publique totale de l’Afrique devrait atteindre 1,86 trillion de dollars, avec des rations moyens dette/PIB passant de 44,4% en 2015 à 66,7% aujourd’hui. « Sur l’ensemble du continent, plus de 20 pays africains sont déjà en situation de surendettement ou au bord du gouffre. Lorsque les remboursements de la dette dépassent les investissements dans la santé et l’éducation, nous devons-nous interroger sur la durabilité et le coût humain de notre trajectoire fiscale ».

« Et si l’Afrique, qui détient 30% des minerais essentiels, 60 % des terres arables et la population la plus jeune de la planète, n’est pas considérées comme bancable, alors qui le sera ? » « Oui, nous devons fournir aux pays les capacités nécessaires pour améliorer leur notation mais la transparence est essentielle ».

Cinq impératifs essentiels pour remodeler le paysage de la dette africaine

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Face aux vents contraires, il est impératif de tracer une nouvelle voie audacieuse, fondée sur des principes. Cinq impératifs essentiels pour remodeler le paysage de la dette africaine et restaurer la souveraineté fiscale souligne Claver Gatete de la CEA.

1-Considérer la dette comme un outil de développement et non de destruction. Nous devons garder à l’esprit que la dette n’est pas mauvaises en soi ; ce qui compte, c’est l’usage qui en est fait. La CEA préconise une approche développementale, où l’emprunt est lié à des investissements productifs dans l’énergie, l’infrastructure, l’industrie et les services connexes. En d’autres termes, nous devons cesser d’emprunter pour consommer et plutôt emprunter pour transformer.

2- Accroître la transparence et renforcer la gestion de la dette. L’Afrique a besoins de stratégies globales, propres à chaque pays, qui tiennent compte de tous les engagements, y compris ceux des entreprises publiques. La transparence doit évoluer vers une culture de la responsabilité, afin de renforcer la confiance des citoyens et des investissements. « La CEA travaille en étroite collaboration avec les gouvernements africains pour fournir un soutien technique, des analyses de la dette et des outils numériques de gestion de la dette ».

3-Réformer d’urgence l’architecture financière mondiale. « Le Système actuel n’est malheureusement plus adapté. Le cade commun du G20 doit être transformé pour devenir prévisible inclusif et équitable. Il doit également accueillir les pays à revenu intermédiaire, faire participer rapidement les créanciers privés et être guidé par les neufs principes fondamentaux des Nations Unies, de la durabilité à l’immunité souveraine ». Il urge donc la mise en place de l’Agence africaine d’évaluation du crédit, une institution qui comprend les réalités de l’Afrique, reflète son potentiel et rétablit l’équité dans la perception mondiale du risque africain. « Son objectif n’est pas de remplacer les agences de notations existantes, mais de les compléter par une plus grande transparence ».

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4-Augmenter les financements innovants et verts. « L’Afrique doit montrer la voie en déployant des instruments tels que les obligations vertes, les obligations bleues et la dette liée à la durabilité pour débloquer des capitaux en faveur du climat ». En outre, les échanges dette-climat et dette-nature permettent d’alléger la pression fiscale tout en investissant dans notre planète. Des pays comme le Cap-Vert, le Gabon, les Seychelles et le Maroc montrent déjà la voie, et la CEA reste déterminée à fournir le soutien technique nécessaire, à renforcer les capacités et à défendre des initiatives telles que la Coalition pour une dette durable. 5- Renforcer la mobilisation des ressources nationales. « Cela implique d’élargir et de numériser notre base fiscale, de combler les fuites, de tirer parti de la technologie et de lutter contre les flux financiers illicites qui coûtent à l’Afrique plus de 88 milliards de dollars chaque année » a souligné Claver Gatete de la CEA ». (A.A.)

Faire face à la réalité de l’évolution du paysage mondial 

Le Secrétaire général adjoint des Nations Unies, Claver Gatete tire la sonnette d’alarme : « Les bouées de sauvetage financières internationales sur lesquelles nous comptions autrefois, y compris l’aide publique au développement, s’estompent. Aujourd’hui, 83% des programmes de l’USAID ont été annulés et les partenaires traditionnels resserrent leurs budgets ».

« Entre-temps, le coût du capital a grimpé en flèche et le cadre commun du G20 reste malheureusement lent, opaque et influencé par les créanciers ».

Outre les cinq impératifs (déclinés en encadré), Claver Gatete ajoute qu’il faut également développer des marchés de capitaux robustes et inclusifs, capables de canaliser l’épargne nationale vers des investissements productifs, de fournir des financements à long terme termes au secteur privé et de réduire la dépendance à l’égard de la dette extérieure.

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Gatete rappelle qu’en créant un marché africain unique de 1,5 milliard de personnes, il peut stimuler les chaines de valeurs régionales, l’industrialisation, la création d’emplois et la mobilisation des recettes, réduisant ainsi la dépendance à l’égard des emprunts extérieurs et renforçant la résilience budgétaire. « Comprenez ainsi que l’Afrique n’est pas sans solution en dépit de l’ampleur des défis auxquels nous sommes confrontés ».

« La Commission économique pour l’Afrique (CEA) est toujours prête à travailler avec vous à chaque étape du processus pour institutionnaliser cette plateforme dirigée par l’Afrique, concevoir des cadres de dettes durables, renégocier des passifs lourds et fournir des outils et des solutions enracinées dans le contexte africain pour changer notre histoire ».

Face à une dette publique africaine croissante, exacerbée par les crises économiques et climatiques, la rencontre de Lomé vise à élaborer une position commune des Etats africains pour une gestion plus équitable et durable de l’endettement. « L’Afrique doit montrer la voie en déployant des instruments tels que les obligations vertes, les obligations bleues et la dette liée à la durabilité pour débloquer les capitaux liés au climat » propose Claver Gatete.


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