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Protection des enfants migrants non accompagnés : L’Afrique de l’Ouest met en place l’approche « Mobilité »


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 Pendant longtemps, les effets positifs de la mobilité des enfants ont été occultés laissant place aux conséquences négatives ou facteurs de risques réduisant ainsi la problématique de la mobilité des mineurs à la seule dimension de migration clandestine. La nouvelle approche de protection des mineurs non accompagnés vise à clarifier les situations tout en mettant en exergue les avantages des déplacements d’enfants en Afrique de l’Ouest.

 

Ph: DR - En Afrique de l’Ouest, les enfants subissent plusieurs formes de violations...

Ph: DR – En Afrique de l’Ouest, les enfants subissent plusieurs formes de violations…

Les acteurs de la protection de l’enfant sont aujourd’hui unanimes à mettre en relief les aspects positifs des mobilités d’enfant en même temps qu’ils continueront de les protéger contre les risques de compromission de leur avenir à l’occasion de leur mobilité. En Afrique de l’Ouest, les enfants subissent plusieurs formes de violations dont la traite, la maltraitance, les violences, les pires formes du travail, la prostitution, la drogue, l’esclavage, l’enrôlement des enfants dans les conflits armés… Selon le rapport des nations unies sur les migrations internationales, édition de décembre 2013, 214 millions d’enfants sont en situation de mobilité dans le monde. 62% d’entre eux vivent dans les pays en voie de développement. En Afrique subsaharienne, ils sont 59 millions d’enfants dont l’âge est compris entre 5 et 17 ans à se retrouver en situation de travail. Les déplacements restent un phénomène structurel ancré dans les réalités ouest-africaines.

Pour une meilleure perception des déplacements d’enfants en Afrique

 Comment pourrait-on assurer la protection des mineurs non accompagnés en Afrique aujourd’hui ? Les mécanismes traditionnels de protection des enfants ayant montré leur limite, les acteurs sont aujourd’hui engagés dans une nouvelle dynamique dénommée approche « mobilité » qui prend en compte les préoccupations de ces enfants. La mobilité des enfants désigne les déplacements d’enfants entre différents espaces géographiques et sociaux ainsi que les expériences vécues par ces enfants au cours de leurs mouvements et séjours en divers lieux de leur parcours. La mobilité des enfants comprend une multitude de pratiques et de situations vécues par les enfants qui bougent à savoir la traite, la migration, le placement, l’aventurisme, etc. Au-delà de la conception criminelle qui était jusque-là entretenue au sujet des déplacements d’enfants, l’approche mobilité ouvre la voie à de nouvelles réflexions sur les motivations et logiques personnelles, familiales et communautaires qui sous-tendent les déplacements d’enfant.

En effet, la mobilité apparait pour les enfants comme une stratégie efficace de survie, d’ascension sociale et de construction identitaire. Cependant, il convient de retenir qu’en dehors des aspects positifs de la mobilité, les enfants mobiles sont déscolarisés et sont exposés à des risques d’abus, de travail, d’exploitation et de maltraitance. Selon monsieur Herman Zoungrana, Coordonnateur régional du projet régional de protection des mineurs migrants non accompagnés, (Bénin, Burkina Faso, Guinée Conakry, Mali, Togo), la dimension «opportunité» longtemps occultée ou méconnue est aujourd’hui rendue visible à travers plusieurs études qui montrent par ailleurs que les circonstances et les contextes dans lesquels les enfants se déplacent et vivent hors du cadre familial d’origine sont sources de nombreux dangers.

Pour une mise en œuvre efficace de l’approche mobilité, des accords bilatéraux sont déjà signés ou envisagés entre certains pays de l’Afrique de l’Ouest, mais il est aussi souhaitable que l’union africaine ou la Cedao porte le projet en vue de globaliser la dynamique pour des résultats assez probants, a souligné monsieur Zoungrana. Il est important que les Etats s’approprient la nouvelle approche, qu’ils démontrent leur engagement à travers l’adoption des législations qui intègrent la nouvelle vision relative au déplacement des mineurs. Il s’agit pour les Etats de porter le projet pour le bien-être des enfants, poursuit-il.

Selon monsieur Aristide Domingo, assistant en charge de l’information, de la communication et du plaidoyer à la délégation Terre des hommes Bénin-Nigeria, cette dynamique régionale qui prend progressivement corps survivra et permettra aux acteurs de protection d’offrir aux milliers d’enfants qui souffrent, la joie de vivre et d’espérer dans ce monde en proie à la violence. Madame Annick Dansou, représentant de l’ONG « Enfants solidaires d’Afrique et du monde » (ESAM) qui coordonne les activités du réseau Afrique de l’Ouest pour la protection des enfants (RAO) au Bénin, a, quant à elle, affirmé que cette initiative participe d’une nouvelle conceptualisation  de la problématique de protection des enfants en même temps qu’elle offre de belles perspectives pour une appropriation africaine de la protection des droits de l’enfant.

 

Ph: DR - Pour une prise en charge réelle des enfants...

Ph: DR – Pour une prise en charge réelle des enfants…

Au cours de leur migration, les enfants perdent souvent leur droit à l’éducation notamment la scolarisation. Monsieur Zoungrana estime que dans la mise en œuvre du projet mobilité, des opportunités d’éducation et de scolarisation seront offertes aux enfants concernés par les mobilités. « L’un des axes importants du partenariat entre Terre des hommes et  Service Social International-Afrique de l’Ouest (SSI-AO) est de mettre en place des outils et des mécanismes concrets de prise en charge des enfants en mobilité », a-t-il ajouté. En effet, pour une prise en charge réelle des enfants, des acteurs vont se positionner aussi bien dans les zones de départ, sur les trajets ainsi qu’à la destination en vue de fournir aux enfants mobiles des services concrets selon leurs besoins d’éducation ou de socialisation. « Cette dimension n’est pas facile à concilier avec la mobilité » a-t-il reconnu. Toutefois, l’école fait partie des droits fondamentaux de l’enfant et le projet intègrera cette dimension dans sa mise en œuvre.

 

Les recherches et capitalisation d’expériences effectuées depuis 2008 sur la protection des enfants ont permis aux différents acteurs, notamment les agences internationales dont l’Unicef, Terre des hommes, Save the Children, Plan International, etc. d’avoir une meilleure compréhension de la migration des enfants en Afrique de l’Ouest et d’initier le projet mobilité conjointement dirigé par SSI-AO et Terre des hommes. La première phase du projet-2008-2010- a permis de mobiliser les acteurs clés, au niveau régional et national, pour élaborer de manière conjointe des positions et des recommandations fondées sur une compréhension plus objective et harmonisée des mobilités des enfants. La deuxième phase qui court de 2011 à 2015 vise à développer des dispositifs de protection adaptés aux réalités socioéconomiques et culturelles afin de réduire la vulnérabilité des enfants mobiles et de renforcer la participation des enfants, des familles et des communautés. La phase pilote du projet regroupe quatre comités nationaux de pilotage regroupant soixante partenaires dans quatre pays à savoir le Burkina Faso, le Bénin, le Mali et le Togo.

 

  Des journalistes pour porter la dynamique

Du 10 au 12 février 2014 s’est tenue à Ouagadougou  une formation sur la protection des enfants en situation de mobilité. Une trentaine d’acteurs dont seize journalistes en provenance du Burkina Faso, du Bénin, du Mali et du Togo ont pris part à la rencontre qui vise à partager avec les acteurs des médias la vision du projet et susciter leur engagement en vue d’une large information du public et de soutenir le plaidoyer auprès des Etats membres lors dans sa mise en œuvre. Une délégation de quatre membres dont trois journalistes de différentes catégories de médias accompagnés par un représentant de Terre des hommes en la personne de Aristide Domingo, et de madame Annick Dansou, représentant de l’ONG ESAM ont pris part à la rencontre. A l’issue de la formation, les journalistes se sont engagés à accompagner le projet mobilité en vue se son appropriation par les populations et les responsables étatiques.

 

Par Charles Dossou Ligan

(ligchar@yahoo.fr)

 

 

 

 


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