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Interview / Mme Valérie Idosso, Directrice départementale des Affaires Sociales Atlantique-Littoral, du Ministère des Affaires sociales et de la promotion de la Femme : « Dans notre contexte, la pauvreté a un visage féminin. Il faut forcément changer ce visage-là »


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Ph/ DR-: Mme Valérie Idosso, Directrice départementale des Affaires Sociales Atlantique-Littoral, du Ministère des Affaires sociales et de la promotion de la Femme

Ph/ DR-: Mme Valérie Idosso, Directrice départementale des Affaires Sociales Atlantique-Littoral, du Ministère des Affaires sociales et de la promotion de la Femme

L-integration.com : Mme Idossou, vos collaborateurs (Assistants sociaux) suivent un cours-atelier sur le droit des femmes sur l’accès à la terre et les dispositifs juridiques qui l’accompagnent. Quelles sont vos impressions ?

Mme Valérie Idossou : Mes impressions sur  le cours qui comportent beaucoup de sessions sur les enjeux liés à l’accès des femmes au foncier, sur les instruments juridiques et sur les dispositifs d’orientation, de médiation et d’appui-conseil ; je trouve que c’est une opportunité pour les Centres de promotion sociale (CPS). Parce qu’au niveau de ses CPS, nous veillons à l’autonomisation des femmes dans sa globalité, économique et sociale.

C’est un aspect qui semblait nous échapper un peu, parce qu’on ne s’y investissait pas suffisamment. Nous donnons par exemple des aides financières aux femmes pour qu’elles puissent entreprendre des activités génératrices de revenus, mais dans un contexte où elles n’ont pas accès à la terre, ces ressources vont se dilapider rapidement car il n’y a que la terre qui représente un patrimoine qui puisse faire profiter la femme à bénéficier d’un prêt plus grand pour agrandir son commerce.

Je pense qu’à partir de ce cours-atelier, les collaborateurs qui travaillent au niveau des CPS – qui sont ventilés dans toutes les communes du Bénin – peuvent dorénavant axer leur communication sur l’accès des femmes au foncier et surtout sur l’orientation, la médiation et l’appui-conseil à ces femmes qui sont dans le besoin. Ces activités ne seront pas faites contre les hommes mais dans une dynamique de dialogue social où homme et femme pourront dire ce qu’ils pensent et comment on fait ensemble, pour que les deux jambes de la famille (homme et femme) puissent participer à son épanouissement.

Déjà quand la femme peut contribuer au paiement de la scolarité, cela permet aux enfants d’accéder aux études secondaires et universitaires ; ainsi donc la génération de cette famille-là  de change et évolue si la femme participe au plein épanouissement. C’est quand-même important de rassurer les hommes – ils sont nos maris, nos frères – car s’ils ne trouvent pas leur intérêt dans cette lutte que nous menons, que cela participe à l’épanouissement du ménage, pour qu’ils puissent s’offrir des plaisirs à eux-mêmes et pour qu’ils puissent rester dignes en disant, j’ai eu des enfants qui réussissent grâce à l’appui de ma femme ; nous avons réussir à pousser nos enfants plus loin parce que nous avons mis nos ressources ensemble.

Donc sans patrimoine, il n’y a pas de ressources dans la famille. Homme et femme doivent avoir accès à ce patrimoine et le gérer ensemble. On peut vendre la parcelle de l’homme comme celle de la femme pour envoyer ses enfants à poursuivre des études valorisantes.

Autrement dit, sans le dialogue et l’entente entre le couple, la femme ne peut obtenir ce qu’elle veut.

Exactement ! Il faut la communication au niveau du couple, elle est très importante. La femme doit dire, je veux acquérir une terre mais pas contre le ménage mais plutôt pour son bien-être. Même si elle garde la propriété de cette terre car ça porte son nom. A l’origine, ce n’est pas pour entretenir les enfants d’autres personnes, c’est ce que la loi dit mais pour entretenir son ménage qui suppose les enfants et l’époux.

Désormais les Assistants sociaux des CPS sont mieux outillés et aguerris pour accompagner les femmes victimes des problèmes fonciers.

C’est une opportunité pour les CPS d’avoir les outils spécifiques pour dire ça, ce n’est pas possible ; ça je te conseille de faire ci et ça  ou je dois voir le chef de la localité pour discuter avec lui ; ou bien je vais t’aider à aller plus loin dans la résolution de ce problème. C’est comme si ces acteurs publics devenaient une épaule aux femmes victimes de l’abus en ce qui concerne la vente des terres.

C’est justement la difficulté des femmes en milieu rural.

Tout à fait ! Ces femmes victimes sont sans repère et elles s’abandonnent à la pauvreté surtout que dans notre contexte, la pauvreté a un visage féminin. Il faut forcément changer ce visage-là vu le pourcentage des femmes dans notre pays pour que le Bénin en sort grandi. D’abord c’est la famille qui en sort grandi et les pères sont contents lorsqu’on dit, c’est mon enfant, il est médecin, entrepreneur, il est riche ; c’est une fierté familiale qui devrait se construire.

Si on écartait la femme de  l’essentiel alors que les hommes sont capables de dire, je meurs pour la terre et les femmes ont l’habitude de dire, je vis pour mes enfants. Et si vous voulez vivre pour les enfants, vous devez avoir des ressources pour les élever convenablement. Donc, homme et femme doivent se donner la main pour vivre pour la famille.

Un mot à l’endroit de vos collaborateurs Assistants sociaux des CPS.

J’en encourage les Assistants sociaux des CPS. Après ce cours-atelier, nous serons là pour pour les coacher, les orienter sur d’autres ateliers de restitution à faire rapidement pour capitaliser les expériences qu’elles ont acquis à cette formation ; pour que ça ne soit pas une expérience vaine. Nous allons les aider vraiment à retrouver dans les communautés, les personnes qu’il faut parce que c’est par échelle de personnes, mais les responsables des collectivités locales sont au premier plan, ensuite au niveau des mairies ; pour agir sur toute la chaîne, il faut agir sur  l’éducation des enfants qui naissent maintenant ; faire en sorte que les filles et les garçons soient éduqués de la même façon. Il faut agir à renforcer l’estime des femmes – ce qui n’a pas été fait dans la famille peut être rattrapé aujourd’hui. C’est comme lorsqu’on grandi et on trouve un époux, on devient fort car il représente un pilier, un appui pour la femme.

De ce fait, les femmes rurales peuvent s’appuyer sur nos services. Nous allons demander à nos services d’aller un peu plus loin parce que c’est des services au niveau communal mais qui font de la stratégie avancée ;  mais si ces services-là peuvent toucher les villages, nous serions sûres que les outils qui sont donnés  aujourd’hui, seront utilisés à bon escient. Et que Konrad Adenauer soit remercié pour cette excellente idée. (Propos recueillis  Aline ASSANKPON)


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