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Le Droit foncier et la vocation successorale de la femme au Bénin « … Le droit successoral confère le quart de la succession à la femme qui peut réclamer son droit en tant que fille héritière de ses parents (ascendants) »


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Ph: DR-: Me Huguette Bokpè Gnacadja, Coordonnatrice du Réseau Wildaf-Bénin

Ph: DR-: Me Huguette Bokpè Gnacadja, Coordonnatrice du Réseau Wildaf-Bénin

La vocation successorale de la femme au Bénin. Des instruments juridiques nationaux, régionaux et internationaux de promotion des droits fonciers au Bénin révolutionnent aujourd’hui le foncier au Bénin. Le Droit de la famille et droit de succession de la femme en lien avec les droits d’accès de la femme à la propriété foncière, Me Huguette Bokpè Gnacadja, Coordonnatrice du Réseau Wildaf-Bénin en parle…

 

(Aline ASSANKPON)

Vulgariser et informer en permanence les instruments du cadre juridique national, régional et international dans lequel s’inscrivent la promotion et la défense des droits fonciers des femmes à travers tout le pays. Afin que la population en général et les femmes en particulier puisse disposer de la liberté d’exercer leur droit d’aller elles-mêmes devant la justice parce qu’ayant eu des informations.

Au titre des instruments juridiques, on note : Au niveau international, la convention des Nations Unies sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes « à laquelle il faut ajouter un certain nombre de directives, de résolutions qui visent à exhorter les Etats membres des Nations Unies à prendre toutes les dispositions pour que les femmes ne soient limitées dans leur droit d’accéder à la propriété par héritage et par voie successorale » ajoute Me Huguette Bokpè Gnacadja, Coordonnatrice du réseau Wildaf-Bénin.

Ensuite, le protocole additionnel à la Charte africaine  des droits de l’homme et des peuples communément appelé Protocole de Maputo au niveau régional dont ces dispositions autorisent la femme à exercer librement son droit d’héritage et successoral. « Donc que les lois en matière des droits de la famille soient légiférées  dans le respect de l’accès égal de la femme à la propriété foncière par voie d’héritage ou successorale » ajoute Me Bokpè Gnacadja.

Les instruments juridiques favorables à la femme

Au niveau national, les textes paraissent de plus en plus clairs et regardant du côté des femmes béninoises. Il s’agit du Code des personnes et de la famille qui a rétabli la femme dans son droit d’hériter de son mari (en cas de décès) et également en tant que fille-héritière de ses ascendants (parents), de ses collatéraux ou de son enfants.

«Et le Code foncier et domanial dans son édition 2013 qui dans la ligne de ce qui existait déjà dans les lois précédentes de code foncier de 1960, 1967 et de 2007 reconnait aux femmes, un droit égal d’accéder à la propriété foncière et recommande même aux collectivités et autorités territoriales et à tous ceux qui sont en charge de la gouvernance foncière locale, de prendre en compte la dimension du genre dans les politiques et services fonciers » rappelle-t-elle.

Au regard de ces instruments juridiques, favorables aux droits de la femme au Bénin, leur mise en œuvre demeure encore une préoccupation.  De l’avis de Me Bokpè Gnacadja, si on s’en réfère au niveau des politiques, des stratégies, des plans programmes relatif au secteur agricole et de tout ce qui concerne les réformes foncières, on n’a pas vraiment le sentiment qu’il y ait des processus participatifs qui fassent une place spécifique aux femmes pour les écouter. Alors qu’elles représentent 70 % de la main-d’œuvre agricole.

 « On sait aujourd’hui, qu’il ne suffit pas d’avoir des lois neutres ; mais il est parfois besoin – comme le disent les normes que nous avons ratifié – de prendre des mesures temporelles  spéciales dans les domaines où il y a vraiment une discrimination à l’égard de la femme. Et le domaine foncier est bien un domaine qui aurait eu besoin de mesures temporelles spéciales pour un peu plus d’équité  pour les femmes ».

Par ailleurs, une étude de 2016 sur la question de l’accès de la femme à la terre au Bénin a montré sans équivoque la domination des hommes qui ont plus d’opportunité d’accéder à la propriété foncière par des voies sécurisées comme l’héritage et l’achat comparée aux femmes qui accèdent à la terre par des voies totalement insécurisées : l’emprunt, le bail et le métayage ; trois voies qui ne garantissent pas la sécurité et la pérennité de leur droit.

« Désormais, nous devons faire en sorte que les textes que nous avons pris, appliqués et accompagnés de mesures – qui réparent le fossé qui s’est creusé entre les femmes et les hommes – soient  permanemment vulgarisés.  Même si ces lois étaient connues déjà par les femmes, elles prendraient d’autres dispositions dans leur relation familiale en se mariant selon les lois devant l’état civil  qui leur assure un statut légal d’épouse et en tirant avantage du droit successoral qui leur confère le quart de la succession et en réclamant leur droit en tant que héritière de leur parent (ascendant) » dira la présidente de Wildaf-Bénin.

Le manque d’information fait que dans certaines familles, les hommes s’accaparent de l’héritage, empêchant les femmes de venir au partage successoral et elles se taisent parce que n’ayant pas l’information.  Certes le manque de confiance de soi au niveau des femmes elles-mêmes, le trafic d’influence, les menaces, la peur  et la terrible phrase entendez : « la terre tue » expriment la résignation des femmes qui préfèrent vivre pour leurs enfants que mourir pour la terre dont elles ont quand-même besoin pour mener des activités lucratives.

Une réalité que Me Huguette Bokpè Gnacadja ne réfute pas : « c’est une arme qui paralyse » reconnait-elle. « Mais parfois, c’est plus la culture de la peur que la capacité d’éliminer quelqu’un ou de l’empêcher d’avancer.  La peur agit souvent sur un terrain favorable. Ce que je crains, c’est ce qui m’arrive selon les extraits de la Bible. Plus on craint quelque chose, plus on se remplit la conscience de cette chose qui finit par nous arriver. Mais c’est une question de choix. Nous notre devoir, c’est d’apporter l’information ».

 

Ph: DR-: Mme Annick Adjilé Agbidinoukou, Communicatrice, gestionnaire, formatrice de formation

Ph: DR-: Mme Annick Adjilé Agbidinoukou, Communicatrice, gestionnaire, formatrice de formation

 Mme Annick Adjilé Agbidinoukou, Communicatrice, gestionnaire, formatrice de formation 

« … Accéder à la terre est pénible  aux femmes, parce que les modes d’accès sont très difficiles ».

De façon synthétisée, je peux dire qu’il y a évolution en matière des droits d’accès des femmes à la terre parce que le cadre légal existe, des dispositions qui favorisent l’accès des femmes à la terre de façon très sécurisée. Mais malheureusement, nos us et coutumes, nos perceptions et préjugés persistent et maintiennent les femmes dans une position où accéder à la terre est pénible ; parce que les modes d’accès sont très difficiles. C’est soit par achat ou l’emprunt qui sont onéreux. Alors que les modes d’accès les plus sécurisés sont l’héritage ou l’occupation primitive qui permet aux femmes de disposer des terres et franchement de les exploiter à bon escient. Nous sommes dans un système patriarcal où à ce jour, les perceptions continuent de voir la femme comme  » le patrimoine de l’homme ». (Propos recueillis par : A. A.)


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