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Projet international : « Un seul monde sans faim2 » / Les parlementaires face à la question de l’accès des femmes à la terre et aux ressources foncières


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Pour une effectivité de l’accès des femmes à la propriété foncière au Bénin.

 Dans le cadre de la mise en œuvre du Projet international « Un seul monde sans faim2 » (EWOH2), la Fondation Konrad Adenauer Stiftung (KAS) en collaboration avec le réseau WILDAF-Bénin a organisé un dîner-débat ce mercredi 05 juillet 2017 au Bénin Royal Hôtel de Cotonou. Objet : Présenter les résultats de l’Etude de base sur la situation des Droits d’accès des femmes à la terre et à la propriété foncière au Bénin et établir une feuille de route commune pour l’atteinte des objectifs dudit projet. Des parlementaires,  le ministre du Cadre de vie, des cadres et experts sur la question foncière, des femmes leaders, représentants de la société civile et des organisations paysannes sont tous conviés à cette soirée.

 

De gauche à droite, Mme Elke Elercke, représentante résidente de la Fondation KAS, Me Huguette Bokpè Gnacadja, présidente de Wildaf-Bénin et M. Didier Tonato, Ministre du Cadre de vie.

De gauche à droite, Mme Elke Elercke, représentante résidente de la Fondation KAS, Me Huguette Bokpè Gnacadja, présidente de Wildaf-Bénin et M. Didier Tonato, Ministre du Cadre de vie.

La ressource terre est le pivot du développement de l’agriculture qui est un secteur primordial de l’économie nationale et par surcroit, la principale activité de subsistance des Béninois. Il est établi que les petits exploitants dont les femmes rurales sont celles qui réalisent la majeure partie de la production agricole. Alors sans la sécurisation foncière, elles ne peuvent évoluer convenablement dans ce secteur. L’accès des femmes à la propriété foncière constitue donc une préoccupation majeure vue le rôle important joué par celles-ci dans la sécurité alimentaire.

L'honorable Eric Houndété et Didier Tonato, ministre du Cadre de vie

L’honorable Eric Houndété et Didier Tonato, ministre du Cadre de vie

Selon les grandes lignes de l’état des lieux de l’étude réalisée par M. François Lègonou de Sydel Afrique, la répartition des facteurs entravant l’accès de la femme à la terre se présente globalement comme suit : Par rapport aux moyens financiers, les acteurs étatiques et non étatiques disposent de 65%, les autorités locales 30 %, les autorités coutumières 11%, les chefs de ménages 62 % et les femmes 72 %. Malheureusement l’accès de la femme à la propriété foncière est limité voir absent à cause de certaines pesanteurs sociologiques et ceci malgré l’amélioration d’un cadre légal favorable à la lutte contre la discrimination à l’égard des femmes.

Quelques femmes leaders

Quelques femmes leaders

 « Une situation qui recommande des actions de concertation au niveau communal et même départemental pour des stratégies pouvant contribuer à l’amélioration pour de l’accès et du contrôle du foncier par les femmes » a souligné M. Lègonou.

Face à ce tableau sombre de l’accès à la propriété foncière des femmes, Me Huguette Bokpè Gnacadja, présidente du réseau Wildaf-Bénin lance un cri de cœur : « Nous ne pouvons pas raisonnablement parler du développement durable si nous ne travaillons pas à une meilleure contribution des femmes très nombreuses dans le secteur de l’agriculture ».

Une vue partielle des participants

Une vue partielle des participants

Pour renchérir, la représentante résidente de la Fondation KAS, Mme Elke Elercke estime qu’un dialogue politique sur la question aiderait à faire bouger les choses. « Toutes nos actions, séminaires, conférences, renforcement de capacités, brochures, études et autres seront nuls sans le soutien parlementaire, civil et politique de notre côté. C’est pourquoi nous aimerions entrer dans un dialogue avec les parlementaires pour trouver une feuille de route commune pour les démarches de notre projet ».

La face cachée de la problématique : la sécurisation foncière

La face cachée de la problématique est qu’au niveau des femmes rurales, elles accèdent à la terre par l’emprunt ou le don qui ne sont pas sécurisés et on leur interdit toute forme d’investissement à court et à moyen terme. Une situation qui ne favorise pas l’autonomisation des  femmes.  Car selon l’un des débateurs, « Si on n’investit pas dans la fertilité de la terre et si on laissait la terre se dégrader, à terme, tout le monde va perdre. Donc on a vraiment intérêt à sécuriser les droits délégués des femmes. (…) Dans la mesure du possible, il convient de mettre l’argent dans les activités productives que de le mettre dans la terre qui coûte aujourd’hui excessivement chère. Le patrimoine productif si on peut le maintenir à un coût minimal, c’est mieux pour tout le monde en particulier pour les femmes des milieux ruraux ».

En voulant lever l’équivoque, le Ministre Didier Tonato (ancien praticien du foncier)  a rappelé que le décret qui fixe le prix de cession des domaines publics de l’Etat n’a jamais influencé notablement le marché foncier régit par le décret de 1964 qui fixait le prix d’un terrain à 1000 ou 1200F le mètre carré.

« Chaque fois qu’on devrait céder le domaine privé de l’Etat pour une opération, les acteurs de la gestion domaniale s’organisaient pour que ce domaine soit cédé à un  tiers qui le revend après. Il y a des gens qui achète de terrain chez l’Etat à un 1.500.000 Fcfa et qui l’ont revendu à 220 millions. Je peux citer dix exemples » dénonce-t-il en poursuivant : « (…) Moi, j’ai fait les évaluations immobilières pour la détermination des valeurs locatives dans Cotonou, Porto-Novo et à Parakou et je suis formel, l’Etat a le droit de définir les prix de cession de son domaine pour éviter que les fonctionnaires fassent du trafic sur son dos».

L’honorable Eric Houndété, premier vice-président de l’Assemblée nationale, a pour sa part, insisté sur l’application des lois et le respect de la sécurité des terres cultivables au début de la soirée. Quant à la question sur la sécurisation des terres évoquées par les uns et les autres, il  a voulu rassurer les organisateurs en occurrence Wildaf-Bénin. « Le parlement n’est pas fermé, nous restons totalement disposés pour prendre en compte les défis nouveaux et les défis qui n’ont pas été perçus à des moments donnés. Le code de la famille est l’œuvre des femmes,  s’il ne tenait qu’aux hommes, ce code aurait toléré la polygamie. Les femmes, celles qui ont défendu le code, ont voulu travailler par étape. 1ère étape : bannir la polygamie ; maintenant, il est resté d’autres défis, de nouveaux enjeux, nous allons essayer de prendre en compte ces enjeux » promet-il.

Les recommandations

Quelques recommandations se dégagent déjà de ce dîner-débat. Il s’agit notamment de la revue des questions du droit successoral ; l’éducation sur l’autonomisation des femmes ; le développement de la communalité au service de l’accès des femmes qui est une nécessité ; la décentralisation et la déconcentration urgente de la gestion foncière ; la revue du coût de formalisation des actes de propriété (une injustice notée dans les milieux ruraux) ; l’accès des femmes qui apparaît comme une stratégie économique ; la sécurisation foncière aussi bien pour les femmes rurales que les femmes qui entreprennent dans l’agriculture ; les violences à l’égard des femmes en lien à la propriété foncière ; la mutualisation des efforts au niveau des femmes (la propriété collective étant reconnue dans le code foncier comme une forme d’acquisition sécurisée) et enfin des actions fortes pour développer d’autres formes d’accès à la terre qui ne soient pas forcément les plus classiques (l’héritage et le don).

Aline ASSANKPON


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