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Plaidoyer pour l’autonomisation des femmes rurales à Zado-Gagbé (Zogbodomey): «Il faut finir avec ces pratiques » exhorte le roi Zodéhougan


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Sa majesté, Zodéhougan Zoungongon de Gado- Zagbé de Zogbodomey

Zado-Gagbé à Zogbodomey, c’est le palais royal de sa majesté Zodéhougan Zoungongon qui a accueilli ce mercredi 11 novembre 2020, l’équipe de sensibilisation de la Konrad Adenauer Stiftung (KAS) en tournée dans le Zou avec le Centre Afrika Obota (CAO). A cette troisième étape, la projection du téléfilm sur la veuve dépossédée de tous les biens de son époux défunt, est le déclic d’un plaidoyer : rois, têtes couronnées, dignitaires religieux et traditionnels se sentent interpeller et s’engagent à aider la veuve non seulement pour la jouissance des biens de son époux défunt ; mais également à faire le choix délibéré d’un second époux. «Le lévirat est interdit par des textes qui protègent la veuve et il faut les respecter » exhorte sa majesté.

Conduite par le Coordonnateur national de la KAS, Mounirou Tchacondoh,  cette activité de plaidoyer entend associer les rois, têtes couronnées, dignitaires religieux et traditionnels à œuvrer pour l’autonomisation de la femme rurale en occurrence celle de la veuve.

Ph: DR-: Le téléfilm de la veuve dépossédée des biens de son époux défunt

La projection du téléfilm de la veuve dépossédée des biens de son époux défunt et qui ignorait que la loi lui confère le droit de revendiquer son héritage et celui de ses enfants délie toutes les langues. Des préoccupations sur le droit d’accès des femmes à la terre, le droit d’héritage des filles, des enfants adultérins, des veuves ; la part d’héritage qui reviennent à chaque héritiers, le droit de propriété exercé par les filles héritières qui vendent la terre, la part d’héritage des frères et sœurs du défunt, etc, autant de questions d’éclaircissements sont posées. Personne n’a voulu rater l’occasion pour  mieux appréhender la problématique du foncier en matière d’héritage, même le souverain.

Le changement de comportement

Le roi Zoudéhougan Zoungongon  apporte sa contribution pour éclairer sa cour. «Je reconnais que dans notre tradition, la femme n’avait  aucun droit d’accès à la terre, ni à l’héritage : c’était la pratique. Mais à observer l’évolution des choses et le comportement des enfants à l’égard des parents, seules les filles prennent bien soins de leur géniteur. Dès qu’elles ont une activité génératrice de revenus, elles pensent à leurs parents, de même que leurs époux. En matière de cotisation, les gendres soutiennent leurs épouses» explique le roi Zodéhougan qui atteste que les comportements changent : «La plupart de nos populations est informée des réformes foncières qui favorisent l’accès des femmes aux facteurs de production, Je n’interviens plus régulièrement sur les conflits fonciers dans mon palais, comme c’était le cas avant votre passage ici. C’est la preuve que les comportements changent ».

La cour royale du Roi Zodéhougan Zoungongon de Zado-Gagbé à Zogbodomey

En effet, cette visite de la KAS au palais royal, est la seconde du genre depuis 2019. «Depuis votre passage, les dignitaires qui ont pris part à cette activité font le relais de l’information dans leur village. En témoigne l’intervention de l’une de mes filles, mariée à Akiza et qui se fait le devoir d’informer son entourage sur le droit d’héritage des femmes surtout celui des veuves » témoigne sa majesté. Celle-ci présente, a invité l’équipe de sensibilisation à apporter le message dans toutes les contrées de Zogbodomey car selon elle, il y a des gens qui n’ont pas encore saisi le message sur les réformes foncières.

La situation des veuves, une préoccupation majeure

«La femme dont l’époux est décédé est déjà éprouvée parce que le veuvage peut durer environ trois ans, ce n’est déjà pas facile. Et au lieu de soutenir  la veuve à travers des présents pour son bien-être et celui de ses enfants, on se préoccupe seulement de comment prendre la place de son défunt époux (le lévirat) et prendre possession de ses biens. Alors que le choix de la veuve découle du comportement du fils ou du frère de son époux défunt. La génération actuelle se soucie peu du bien-être de la veuve. On décide de prendre la veuve de force. Et si, elle s’y oppose, la conséquence : on lui arrache tous les biens patrimoine de son époux défunt sans se soucier de l’avenir des orphelins » apporte le roi comme témoignage.

Le roi et sa cour

«Il faut finir avec ces pratiques » exhorte-t-il en poursuivant : «Il faut permettre à la veuve de jouir des biens de son époux défunt. Elle a désormais la liberté de choisir un autre époux dans la famille ou ailleurs, elle peut également décider de ne plus se remarier. Il y a des textes qui protègent la veuve et il faut les respecter » martèle le roi.

Globalement, tous les acteurs qui sont impliqués dans la mise en œuvre dudit projet, peuvent se réjouir des résultats sur le terrain. Certes, l’évolution observée aujourd’hui ne justifie pas encore la fin des pratiques discriminatoires à l’égard des femmes. Rappelons qu’il y a quatre ans (en 2016), les premiers jours de sensibilisation étaient difficiles dans ce département. Il y avait des hostilités, des blocages, des menaces à peine voilées  surtout au niveau des hommes. « Mais ces blocages, loin d’être une entrave  nous ont permis de constituer  des éléments de réflexion et de stratégie de communication » laisse entendre Didier Zinsou, l’actuel administrateur du CAO.

M. Didier Zinsou, l’actuel administrateur du Centre Afrika Obota (CAO).

«Aujourd’hui, de plus en plus, il y a une frange des hommes acquis pour le principe qui se disent que le rôle joué par la femme dans le développement socio-économique est très important pour la stabilité des ménages, notamment les têtes couronnées et les dignitaires religieux ».

Appréciant l’implication des rois, M. Zinsou déclare : « Il faut se réjouir de ce que les souverains soient vraiment ouverts, disposés à nous accompagner dans ce processus. Et publiquement, leur prise de parole, leur position ouvrent la voie à leurs fidèles encore résistants pour qu’ils puissent se raviser pour que progressivement, nous atteignons l’objectif  fixé».

«Les femmes n’hésitent plus à prendre la parole même devant les dignitaires  et à poser les problèmes concrets auxquels elles sont confrontées. Et la réaction des rois est spontanée,  que ça soit à Tindji, à Djidja ou à Zogbodomey, c’est réconfortant. Les portes des palais sont grandement ouvertes à ces femmes dès qu’elles ont des problèmes en matière d’héritage ou d’accès à la terre» ajoute-t-il.

Pour Célestin Ballé, l’un des animateurs de la CAO, les rois sont détenteurs de l’autorité et ils prennent ainsi leur responsabilité. « L’information que nous portons est adressée aux hommes et femmes dignitaires de la cour royale dont le chef suprême (le roi) en fait désormais un problème personnel. C’est déjà une réussite. On va espérer que la vulgarisation soit faite et que la veille sur la sauvegarde des droits d’accès des femmes à la terre soit permanente».

Aline ASSANKPON

 


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