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Interview / M. Konrad Gbaguidi, Fondateur et Directeur du Cabinet NGTIC-Conseils « La : responsabilité financière et l’enrichissement risquent de ne plus avoir de passerelles… »


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Ph: DR-: M. Korand Gbaguidi, Fondateur et Directeur du Cabinet NGTIC-Conseils.

Fondateur et Directeur du Cabinet NGTIC-Conseils, M. Korand Gbaguidi, à  travers un argumentaire solide, développe ici des concepts de l’éducation financière et ses ramifications : De l’épargne au profil financier d’un agent économique en passant par la dépendance financière, l’indépendance financière, la liberté financière, l’identité bancaire et l’identité digitale. Selon lui, il s’agit des logiques qu’il faut apprendre. « La vraie éducation financière, c’est faire le bon choix qui nécessite une formation » conseille-t-il.

L-integration.com : M. Gbaguidi, peut-on vous connaitre ?

Konrad Gbaguidi: Je suis Fondateur et Directeur du Cabinet NGTIC-Conseils, un cabinet qui accompagne dans les solutions digitales et solutions d’analyses de données qui est basé à Paris, à Abidjan et à Cotonou. Nous intervenons dans tous les secteurs d’activités. Aujourd’hui, nous sommes sur l’intelligence artificielle (le Big Data), ensuite, nous avons des activités d’accompagnement de structuration d’entreprises et de développement d’entreprises. Nous avons la stratégie même qui permet aux entreprises de se développer.

Au regard des institutions bancaires que nous avons, les Systèmes financiers décentralisés, (SFD), les Etablissements d’émetteurs électroniques, quel type de stratégie adoptée pour toucher la clientèle ?

La stratégie de communication dépend en fait des cibles. Quelle cible on veut atteindre, quels sont les besoins exprimés par ces cibles et quel produit adapté à ces cibles et comment s’adresser à ces cibles de manière segmentée ? Je prends quelques  exemples :

Il y a des gens qui gagnent au Loto et sont surpris de devenir riches. Mais bout de quelques temps, ils deviennent  plus pauvres qu’avant leur gain ; parce que c’est des gens qui n’étaient pas préparés. Il y a là, un problème d’éducation financière.

Il y a des gens qui deviennent de grands directeurs, des docteurs, des responsables qui ont de belles voitures et lorsqu’ils ne sont plus à leur poste, ils passent à une moto, voire même encore plus bas, pourquoi ? Problème d’éducation financière.

Avec la doctrine sociale de l’achat de terrain, il y a des gens qui disent souvent j’ai des parcelles mais n’ont pas la capacité de rentrer dans un restaurent pour manger. Ils ne peuvent s’occuper de la santé, ni de l’éducation de leurs enfants. C’est un cas de choix financiers de dépenses qui n’est pas rentable. Un très mauvais choix.

Voilà donc quelques éléments de cibles que je prends en exemple pour développer mon argumentaire. Lorsqu’on commence à travailler et à gagner un revenu, on a deux notions à assurer : la responsabilité et l’ambition de progresser. Il revient donc de travailler, d’avoir des responsabilités, de se faire former pour gagner plus de revenus afin d’épargner. A partir de ce moment-là, on grandi d’un pas. Celui qui a son entreprise a deux responsabilités : la responsabilité  que son entreprise prospère et la responsabilité qu’il s’enrichisse. Donc, il faut savoir gérer son économie en termes de dépenses et de recettes pour pouvoir épargner.

Le premier cas, on appelle ça de la dépendance financière. A partir du moment où, je n’ai que 40 ou 50.000 F pour vivre, je suis dépendant financièrement et je vais donc chercher à être indépendant financièrement. Celui qui par exemple a investi avec un certain nombre d’expériences, peut mettre de l’argent de côté et se retrouvera dans une forme d’indépendance  financière, deuxième cas.

C’est totalement inutile d’avoir 10, 15, 20 parcelles. Je le dis avec beaucoup de mesures. Celui qui fait de bons choix,  pourrait peut-être avoir une ou deux parcelles avec des maisons bien construites et mises en location. Au bout d’un certain temps, il sera beaucoup plus riche que celui qui a gardé dix parcelles sans rien en faire. Parce qu’il n’a pas su les valoriser. Et lorsque sur le fait, je passe de deux maisons à quatre, cinq, je vais rentrer dans un statut qu’on va appeler : la liberté financière, un troisième cas. A ce moment-là, ce n’est plus nous qui travaillons pour gagner l’argent, mais c’est l’argent qui travaille pour qu’on puisse vivre. C’est des logiques qu’il faut apprendre. La vraie éducation financière, c’est faire le bon choix qui nécessite une formation.

Je propose aux acteurs financiers de travailler sur quelques vocables : l’identité financière, l’identité bancaire et l’identité digitale avec laquelle on relie les choses. Les personnes qui ont commencé par épargner, ont un suivi bancaire ; on sait qu’au bout de deux ans elles ont su mettre de l’argent de côté. Donc, on peut les accompagner : Avec une épargne de 500.000, on peut leur prêter 5 millions. Parce que vous avez une identité bancaire et on sait comment vous fonctionnez au niveau de votre compte.

Quel avantage la jeunesse peut-elle tirer de l’éducation financière et de la digitalisation ?

L’Education financière est un peu nouveau ; même les pays de l’OCDE ont commencé à s’intéresser à la question depuis seulement 2005, à peine 14 ans. Du coup, on se rend compte que si les populations étaient davantage informées, formées, accompagnées et conseillées, elles pourraient mieux organiser leur argent, mieux s’enrichir, du coup participer plus sainement au développement du pays. Cet enjeu est important pour  les pays de l’Uemoa notamment la banque centrale pour initier chaque année une semaine de l’inclusion financière.

Aujourd’hui, il est question d’intégrer l’éducation financière dans les programmes scolaires. Vous partagez certainement cette vision ?

L’éducation financière, ça ne sera pas seulement à l’école ; ça doit être généralisé. Les familles aujourd’hui constituent le premier écosystème où se fait une petite initiation de l’éducation financière. Par exemple, l’argent de poche donné aux enfants pour faire de petites dépenses, c’est une manière de les amener à utiliser l’argent ; mais à ce niveau-là, il est intéressant dans les familles de leur apprendre à épargner. C’est une éducation financière dès le départ, à partir de l’argent de poche. Identifiés, on peut agir sur le profil financier des enfants afin qu’ils progressent. On remarque également ça souvent au niveau des mères qui amènent leurs filles au marché pour tenir les étalages peut-être pas suffisamment de dimensionnement sur l’ensemble des enjeux d’une éducation financière. Mais il y a un accompagnement qui peut être intéressant pour aller plus loin au niveau des familles.

Quelle sera la responsabilité des institutions financières et de l’Etat dans cette inclusion financière?

Aux institutions financières, je leur suggère de mettre en place un porte-monnaie de l’enfant, « Un porte-monnaie jeune ». Ça veut dire qu’en donnant 1000 F à votre enfant, on doit donner la possibilité à cet enfant de le mettre sur un compte. On peut mettre en place l’épargne de l’enfant avec les solutions digitales qui existent aujourd’hui. La dépense peut être plus maîtrisée mais l’épargne peut être beaucoup plus rapide pour les enfants. C’est quelque chose qu’il faut y penser au niveau de la couche familiale.

Il y a également tout ce qui est lié au professionnel aujourd’hui que ça soit le secteur formel ou informel. 90 à 95% de notre population mène des activités dans le secteur informel. Une bonne partie de ces gens-là ne mettent pas leur agent à la banque ; donc n’utilisent aucun support bancaire pour dépenser ou pour gagner de l’argent. Si les institutions financières mettaient en place des programmes de proximité  et des conseillers de proximités décentralisés, pour se rapprocher de ceux-là, pour les aider à constituer leur identité financière, à mieux s’enrichir ; il y a tellement de gens dans l’informel que vous pouvez avoir autant de profils bancaires, notamment les femmes des zones rurales qui ont besoin d’un accompagnement. C’est une manne formidable, le domaine de l’informel.

L’Etat a aussi un intérêt à les aider, à jouer ce rôle avec les banques, les accompagner et à mieux l’inscrire dans une politique  publique globale qui non seulement pourra être déclinée au niveau de notre secteur privé mais également apporter une structure à l’école.

Le citoyen lambda peut-t-il aussi tirer avantage de la digitalisation financière?

La digitalisation de l’inclusion financière est encore embryonnaire, elle n’est pas encore faite ; aujourd’hui, on est plus sur les facilités que nous offrent les réseaux téléphoniques pour faire des transferts d’argents et de Mo.  C’est quelque  chose qui facilite les différentes activités des personnes.

Je pense qu’il y a quelque chose de plus importante à faire : c’est d’instaurer  une vraie relation entre les institutions financières et les réseaux téléphoniques,  voire les Finthec  pour essayer de concevoir des produits  purement d’ordre éducationnel  en termes de visuels, (petites vidéos, blagues, les choses simples). Chaque chose a son temps, c’est pour dire que lorsqu’on est dans une situation, pour passer à une situation suivante, il faut mesurer que là où on est, est assez solide. Le côté digital va prendre ça en compte ; c’est-à-dire que la responsabilité financière et l’enrichissement sont deux aspects qui risquent de ne plus avoir de passerelles lorsqu’on ne fait pas attention.

Le public doit retenir que ceux qui veulent aller plus vite et qui font plusieurs  prêts à gauche et à droite, sans savoir comment ils vont rembourser, peut-être devraient-ils mettre en place un accès à leur compte pour suivre davantage leurs dépenses et s’arrêter au bon moment. Car pour l’instant, nous n’avons pas encore conçu de projets digitaux pour faire en sorte que les gens soient informés, éduqués au quotidien pour assainir leurs choix de dépenses.

Propos recueillis par : Aline ASSANKPON


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